ENQUÊTE: L’affaire de corruption qui éclabousse Jules Alingete en RDC

Jules Alingete, le chef de l’Inspection Générale des Finances (IGF) en RDC, est accusé par une organisation civile de corruption et de blanchiment d’argent. Des preuves, dont des vidéos et documents, ont été fournies, et un appel à enquête a été lancé. Alingete aurait utilisé son statut pour extorquer des fonds de sociétés privées, menaçant l’intégrité financière de la RDC.

Une tempête se prépare au sommet de l’Inspection Générale des Finances (IGF) de la République Démocratique du Congo, alors que Jules Alingete, son chef, est accusé par le Comité de Surveillance des Finances Publiques (CSFP), une organisation de la société civile, de corruption, de prédation sur des entreprises privées, et de blanchiment d’argent. Ces allégations mettent en lumière de potentielles failles dans l’appareil de lutte contre la corruption du pays et appellent à une action immédiate.

Selon cette organisation, Alingete aurait orchestré un réseau mafieux exploitant sa position pour extorquer des fonds de sociétés privées, avec des preuves de transactions douteuses et de détournements de fonds publics. Des preuves incluant des déclarations vidéo de témoins clés, des documents signés, et des appels urgents pour une enquête ont été soumis au Procureur Général, suscitant une onde de choc à travers la nation.

Des preuves contre Alingete

Dans une lettre adressée au Procureur Général près la Cour de Cassation de Kinshasa, le Comité de Surveillance des Finances Publiques a formulé de graves accusations de corruption, de prédation sur des entreprises privées, et de blanchiment d’argent contre Jules Alingete, Chef de l’Inspection Générale des Finances (IGF) de la République Démocratique du Congo (RDC).

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Le Comité a détaillé six incidents spécifiques dans sa lettre, suggérant un schéma de comportement corrompu par Alingete. Le 6 mai 2019, un paiement de 700.000,00 USD a été reçu par Alingete de la part de la RAWBANK, représentant un acompte sur une somme totale de 1.100.000,00 USD, officiellement pour une commission liée au redressement fiscal de 2018 de la banque. La suite de ce paiement, un solde de 400.000,00 USD, a été également perçu par Alingete le 20 mai 2019, soulevant des interrogations sur la nature et la légalité de cette transaction.

L’affaire ne s’arrête pas là, le 30 janvier 2020, une autre somme importante de 200.000,00 USD a été remise à Alingete par un individu nommé YOUSSOUF, cette fois sous le prétexte de la première tranche de la TVA pour l’année 2020. Le 14 mai 2021, Alingete a, une fois de plus, reçu 200.000,00 USD des mains de YOUSSOUF, continuant le schéma de paiements douteux. Le 18 février 2022, dans une torsion familiale, Madame BOBETTE, belle-sœur d’Alingete et membre de son cabinet, a reçu 600.000,00 USD de YOUSSOUF, comptable du Groupe BELTEXCO, prétendument pour Alingete.

L’IGF est censée être le bastion de la lutte contre la corruption en RDC. Jules Alingete a été nommé à ce poste en juillet 2020, dans le cadre des efforts du Président Félix Tshisekedi pour lutter contre la corruption et améliorer la gouvernance financière dans le pays. Alingete a la responsabilité de surveiller la gestion des finances publiques, y compris les dépenses gouvernementales et les entreprises d’État, pour s’assurer qu’elles sont réalisées de manière transparente et responsable.

Avant sa nomination à la tête de l’IGF, Alingete a accumulé une vaste expérience dans le domaine financier et comptable. Il est diplômé en sciences économiques de l’Université de Kinshasa et est un expert-comptable agréé. Alingete a servi dans différentes capacités au sein du gouvernement et du secteur privé, où il a développé une expertise en matière de fiscalité et de climat des affaires.

Sa nomination à l’IGF a été largement vue comme un pas vers la réforme du secteur financier en RDC, en raison de sa réputation d’intégrité et de son engagement en faveur de la transparence. Sous sa direction, l’IGF a lancé plusieurs audits et enquêtes sur des allégations de corruption et de mauvaise gestion, menant à des actions contre des fonctionnaires et des entités accusées de détournement de fonds publics.

Toute la lutte anti-corruption menacée

Le Comité de Surveillance des Finances Publiques, à l’origine de cette dénonciation, appelle à une enquête approfondie pour mettre un terme à ce qu’il considère comme une prédation menaçant les finances publiques et la confiance du peuple dans une gestion responsable des ressources de l’État.

Les implications de ces allégations ne sont pas seulement de nature financière; elles soulèvent également des questions profondes sur la confiance que le public congolais peut accorder à ses institutions. Avec des fonds s’élevant à des centaines de milliers de dollars apparemment échangés dans des circonstances douteuses, les soupçons de corruption menacent d’ébranler le pilier même censé protéger l’économie nationale contre de telles pratiques.

Les détails contenus dans les documents de dénonciation mettent en évidence la nécessité d’une enquête approfondie pour déterminer l’étendue de l’abus de pouvoir et de la corruption présumés. La suite de l’affaire Alingete pourrait s’avérer déterminante non seulement pour l’avenir de l’IGF mais également pour l’intégrité de la gouvernance financière en RDC.

Nos tentatives pour obtenir les commentaires de l’IGF et de M. Alingete sont restées sans réponse. Néanmoins, des sources proches de l’IGF, s’exprimant sous couvert d’anonymat, ont rejeté les accusations comme étant fallacieuses et motivées par des tentatives de nuire à la réputation de M. Alingete, ainsi qu’aux succès obtenus dans la campagne contre la corruption menée par le président Tshisekedi. « Nous sommes au courant de ces accusations fallacieuses fabriquées pour nuire à M. Alingete. Ce sont des gens qui sont inquiets de son travail qui risque de démanteler leur réseau de fraudeurs. Ils visent également le combat victorieux du Président Félix Antoine Tshisekedi contre la corruption. Mais ils n’y arriveront pas. »

Toutefois, dans une vidéo publiée depuis l’Inde, Monsieur Youssouf corrobore les accusations et exprime son désir de témoigner, appelant à des garanties pour sa sécurité. « Je m’appelle Youssuf, en ce moment je suis en Inde. J’ai déjà témoigné deux fois devant le magistrat contre le Chef du Service de l’IGF, M. Jules Alingete et la famille Rawji. Je suis prêt à donner toutes les informations devant toutes les autorités et je suis prêt à revenir au Congo pour toutes les formalités (judiciaires) mais à condition que j’ai une sécurité totale,” dit-il dans cette vidéo parvenue à POLITICO.CD, ajoutant qu’il a peur pour sa vie.

Plusieurs sources judiciaires confirment en effet que cet homme d’affaires qui vivait à Kinshasa jusqu’à lors a bel et bien été entendu par la justice congolaise à ce sujet comme il l’affirme. “Mais il y a eu des fortes pressions pour que l’on classe le dossier,” explique un magistrat qui a requis l’anonymat à POLITICO.CD.

Néanmoins, la lettre du Comité de Surveillance des Finances Publiques appelle à une enquête approfondie pour examiner ces accusations, soulignant l’urgence de faire la lumière sur ces actes présumés de corruption qui mettent en péril les finances publiques et la confiance dans l’administration. “Les allégations contre Jules Alingete représentent un défi majeur pour le système judiciaire de la RDC et pour la lutte contre la corruption dans le pays. La communauté nationale et internationale attendra de voir comment cette affaire sera traitée, espérant que la justice prévaudra et que les responsables seront tenus pour compte,” explique un analyste à POLITICO.CD. “Mais il y a des forts risques que rien ne soit fait. Depuis le début du mandat du président Tshisekedi, très peu sont inquiétés malgré les faits. Et surtout que Jules Alingete jouit d’une position pondérante dans ce régime,” ajoute-t-il.

De son côté, le Comité de Surveillance des Finances Publiques et les citoyens congolais appellent les autorités judiciaires à agir rapidement et de manière transparente pour enquêter sur ces graves accusations, afin de protéger les finances publiques et de restaurer la confiance dans les institutions financières du pays.

Le travail de M. Alingete n’est pas sans critique. Une dispute notable a éclaté entre lui et Tony Mwaba, le ministre de l’Enseignement primaire, secondaire et technique, qui a été accusé de tentative de détournement de fonds. M. Mwaba a réagi vigoureusement, menaçant de porter plainte contre l’IGF pour ces allégations qu’il juge calomnieuses.

Le conflit s’est approfondi lorsqu’il a été révélé que M. Alingete aurait tenté de favoriser Veridos, une entreprise liée à ses connaissances, dans un contrat controversé pour la fourniture de cartes biométriques aux élèves du primaire. Selon M. Mwaba, qui a bloqué un paiement significatif à Veridos, M. Alingete l’aurait contacté pour intervenir en faveur de cette entreprise. La situation est complexe et les détails de l’affaire restent flous, mais ce qui est clair, c’est que l’histoire touche aux fondements mêmes de la gouvernance et de l’État de droit en RDC.

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