Sénat : Willy Bakonga demande sa réintégration, son suppléant Reagan Bakonga s’interpose

Willy Bakonga tente son va-tout. Question, peut-être, d’échapper à la Justice congolaise en cherchant à faire valoir des immunités parlementaires. En effet, une convocation du Parquet près la Cour de cassation avait été adressée à ce Ministre sortant de l’Enseignement Primaire, Secondaire et Technique (EPST), pour qu’il s’y présente le 16 avril. Willy Bakonga ne s’y était pas présenté. Les jours suivants, pendant que l’opinion se demandait ce qu’il lui serait arrivé, l’on apprendra que le Ministre Bakonga est aux arrêts à Brazzaville depuis le mardi 20 avril dernier. Il tentait d’échapper à la Justice. Mais ce n’était pas sa première tentative.

Willy Bakonga avait déjà écrit au Bureau du Sénat, depuis le 17 avril, pour solliciter sa réintégration au sein de la Chambre haute du Parlement congolais comme Sénateur, où il a laissé son frère Reagan Bakonga Bilanga comme suppléant. C’était 24 heures après le jour où il était attendu au Parquet. Il voulait en effet recouvrer ses immunités parlementaires en vue d’échapper aux poursuites judiciaires. Coup de théâtre, son frère et suppléant au Sénat lui a réservé une réponse qui laisse stupéfait: il veut occuper définitivement le siège du Ministre sortant au Sénat.

Lors de la plénière de ce jeudi 22 avril, tout est parti de la lecture publique faite par le Président du Sénat, Modeste Bahati, d’une correspondance datée du 17 avril 2021. Dans cette lettre, Willy Bakonga demande sa réintégration. « Honorable Président, par la présente, j’ai l’insigne honneur de vous informer que je regagne mon siège au Sénat conformément au règlement d’ordre intérieur et usage au sein de notre institution », lit-on dans cette correspondance. En outre, Willy Bakonga dit avoir réservé une copie pour information au Sénateur Reagan Bakonga, son frère.

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Dans l’hémicycle, Reagan Bakonga refuse catégoriquement de reconnaître l’authenticité de cette lettre qu’il qualifie par ailleurs de fausse. Il demande au Bureau du Sénat de ne pas la prendre en compte. Pour lui, les choses sont claires : « Willy Bakonga a déjà renoncé à son mandat » de Sénateur. Il s’explique : « À défaut de se prononcer dans le délai, il est présumé avoir renoncé à son mandat de Sénateur. Vous allez vous souvenir lors de notre élection du bureau définitif, Willy Bakonga n’était pas dans la salle pour la simple raison qu’il avait renoncé à son mandat de Sénateur », a aegumenté Reagan Bakonga.

Ce dernier se dit surpris par cette correspondance de son frère et invite le Bureau du Sénat à rejeter carrément cette demande car, dit-il, il s’agit de l’usage de faux. « Je suis étonné de voir, curieusement aujourd’hui, qu’il y a une lettre qui vient encore au Sénat pour la validation de son mandat au moment où il y avait déjà renoncé. Honorable Président, je demande à votre sagesse et à la plénière de pouvoir rejeter carrément et simplement car il s’agit de l’usage de faux ».

Pour sa part, le Bureau du Sénat a, au regard de l’article 110 de la Constitution et 112 du Règlement intérieur, pris acte de cette demande du Ministre sortant de l’EPST.

Soupçonné de détournement de fonds alloués notamment à la gratuité de l’école primaire en RDC, des frais de fonctionnement de son ministère et de l’argent décaissé par l’État pour la désinfection des écoles, Willy Bakonga a été arrêté le 20 avril à Brazzaville. Il est détenu momentanément dans les locaux de la Centrale d’intelligence et de la documentation de Brazzaville.

Le Gouvernement congolais a officiellement formulée une demande d’extradition de Willy Bakonga. La demande a été adressée à la Justice du Congo Brazzaville. Plusieurs sources judiciaires en République Démocratique du Congo affirment que Willy Bakonga sera incessamment extradé pour être entendu sur des faits lui imputés, notamment le détournement présumé des deniers publics.

Selon l’Association Congolaise pour l’Accès à la Justice (ACAJ), Willy Bakonga « a traversé le fleuve Congo par pirogue, avant hier (soit le 18 avril) la nuit, sous fausse identité pour rejoindre Brazzaville. Hier soir (soit le 19 avril), il a tenté de voyager par Air-France pour Paris et 2 millions USD ont été trouvés dans son sac ! Grave ! », peut-on lire dans un Tweet de cette organisation de défense des Droits Humains. Selon des sources policières de Brazzaville relayées par l’Agence France Presse (AFP), Willy Bakonga a en effet été débarqué de l’avion Air-France, en partance pour Paris puis, mis aux arrêts.

Au sujet de la gestion des fonds destinés à la gratuité de l’enseignement, un procès public avait été ouvert le 5 mars 2021 et s’est clôturé le 25 du même mois. Le Directeur Général du Service de Contrôle et de Paie des Enseignants (SECOPE), Dhelon Kampayi ainsi que l’Inspecteur Général de l’EPST, Michel Djamba, ont été condamnés chacun à 20 ans de prison ferme. Le Ministère Public reprochait à ces derniers d’avoir violé des dispositions légales en matière de passation de marché public, notamment l’absence de la publicité et de l’appel d’offre dans le processus de recrutement des fournisseurs, et surtout la non prise en compte des règles de comptabilité publique qui régentent l’administration publique. De leur côté, les 2 prévenus avaient plaidé non coupable au cours de l’audience devant le Juge président du tribunal du séant, Aimé Ilunga. Willy Bakonga, quant à lui, était entendu dans le cadre de ce procès comme simple renseignant, ce qui n’avait pas manqué de susciter un tollé dans l’opinion congolaise qui souhaitait plutôt l’y voir comme prévenu.

Carmel NDEO

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