RDC: « l’indifférence, l’inaction et le silence complice de la communauté internationale ont contribué au pourrissement de la situation sécuritaire et humanitaire » (D. Mukwege)

Le docteur Denis Mukwege a dénoncé la
complicité et l’inaction de la communauté internationale face à la détérioration de la situation sécuritaire, humanitaire et politique en République démocratique du Congo. Le Prix Nobel de la paix a fait cette déclaration à l’occasion du deuxième anniversaire de l’Accord-Cadre pour la paix signé à Addis-Abeba en février 2013 par onze (11) pays africains sous l’égide des Nations unies.

Dans sa réflexion, Denis Mukwege note que le dixième anniversaire de l’Accord de l’espoir correspond à une période critique où la nation congolaise est en péril et fait l’objet pour la énième fois d’une guerre d’agression, directement et par procuration, menaçant sa souveraineté, l’intégrité de son territoire et les maigres acquis de l’investissement international de 25 dernières années.

« Un coût humain tragique continuera si l’on ne parvient pas à résoudre les causes profondes de la violence et de l’instabilité », a-t-il prévenu.

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« Le temps est venu de sortir la tragédie congolaise de l’indifférence, de l’inaction et du silence complice de la communauté internationale qui ont contribué au pourrissement de la situation sécuritaire, humanitaire et politique, avec un impact désastreux sur le respect et la protection des droits humains », a-t-il ajouté.

La patron de la Fondation PANZI a tout aussi invité la RDC et ses partenaires à s’attaquer aux principales causes structurelles qui constituent les éléments moteurs des conflits qui persistent à l’Est du pays, à savoir l’exploitation et le commerce illégal des ressources naturelles et la culture de l’impunité.

A ce titre, il estime que Kinshasa doit entreprendre des réformes institutionnelles pour garantir le respect de l’état de droit, favoriser une culture des droits humains et rétablir la confiance dans les institutions, notamment celles en charge de garantir la sécurité et de rendre la justice.

Dénonçant la politique de deux poids deux mesures et le traitement partial des conflits par la communauté internationale, Mukwege plaide pour l’utilisation des moyens nécessaires afin d’endiguer la nouvelle escalade de la violence dans l’Est de la RDC.

« Alors que la communauté internationale s’est à juste titre soudée depuis un an pour sanctionner l’agression et l’occupation de l’Ukraine par son voisin russe et lui apporter tout le soutien et l’assistance nécessaire, nous appelons l’opinion publique et les décideurs tant nationaux qu’internationaux à utiliser tous les moyens nécessaires pour endiguer sans tarder cette nouvelle escalade de la violence dans l’Est de la RDC », a pesté Denis Mukwege qui confie par ailleurs que la stabilité au cœur de l’Afrique est essentielle pour la paix et la sécurité internationales, mais aussi pour l’économie mondiale et la transition énergétique.

« Il est urgent de mettre un terme aux agressions récidivistes des pays à la base de la déstabilisation de la RDC en utilisant le recours à un régime de sanctions et de conditionnalité de l’aide. Les pays et les institutions partenaires de la RDC, notamment les co-garants de l’Accord-Cadre ne peuvent plus tolérer ces violations flagrantes du droit international sans réagir », a-t-il souligné.

Au gouvernement congolais, Mukwege a rappelé l’urgence de mettre fin à ce qu’il a qualifié « d’indignation sélective, à l’humanisme à géométrie variable et aux politiques de double standards » qui entraînent un déficit de confiance et de crédibilité dans les institutions internationales et le multilatéralisme afin que l’état de droit tel que prôné par Félix Tshisekedi, soit respecté au niveau international.

« A défaut d’appliquer les principes d’équité et de cohérence, un réel danger guette notre système de sécurité collective et la rue africaine désabusée s’orientera vers Poutine », a argué l’homme qui répare les femmes avant de rappeler que la souffrance est universelle et la soif de dignité et de justice l’est tout autant.

« Le sang des Congolais a trop coulé. A l’instar de tous les peuples, la Nation congolaise a le droit de disposer d’elle-même, et de vivre en paix. Si les défis sont nombreux, le chemin de la paix est possible. Il passera par plus de sécurité, plus de responsabilité dans le commerce mondial, plus de justice et plus de démocratie. Je gage qu’ensemble, avec une volonté politique renouvelée de la RDC et de la communauté internationale, nous y arriverons », a affirmé le célèbre gynécologue congolais.

L’Accord-cadre a été signé le 24 février 2013 dans la capitale éthiopienne par onze pays africains sous l’égide des Nations unies. Il vise la restauration de la paix dans l’Est de la RDC, en proie à l’insécurité depuis plus de deux décennies.

Les pays signataires s’étaient notamment engagés à ne pas tolérer, ni fournir une assistance ou un soutien quelconque à des groupes armés. Ils s’étaient également engagés à :

  • Ne pas s’ingérer dans les affaires intérieures des Etats voisins;
  • Respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale des Etats voisins;
  • Renforcer la coopération régionale, y compris à travers l’approfondissement de l’intégration économique avec une attention particulière accordée à la question de l’exploitation des ressources naturelles;
  • Respecter les préoccupations et intérêts légitimes des Etats voisins, en particulier au sujet des questions de sécurité;
  • Ne pas héberger ni fournir une protection de quelque nature que ce soit aux personnes accusées de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité, d’actes de génocide ou de crimes d’agression, ou aux personnes sous le régime de sanctions des Nations Unies; et Faciliter l’administration de la justice, grâce à la coopération judiciaire dans la région.

Carmel NDEO

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