Rebondissement dans les enquêtes de l’IGF autour du dossier de financement présumé de EGAL

« La société EGAL SARL a été financée par 43 millions de dollars provenant de la Banque Centrale !» C’est l’accusation proférée depuis des années par des acteurs de la société civile et quelques politiques. Toute une affaire y est née, défrayant la chronique sur les médias et les réseaux sociaux. Ces derniers mois, la société privée, donnée proche de l’ancien président Joseph Kabila, s’est retrouvée au banc des accusés, poussant l’Inspection générale des Finances, qui a déclaré une guerre farouche à la corruption, à enquêter.

Dans une lettre du 8 février 2021, Julien Angete, Inspecteur général de l’IGF, écrit au Directeur général de la société EGAL pour lui demander des explications autour de ce prêt présumé, qui s’évaluerait à hauteur de près de 43 millions de dollars américains. « Il ressort des échanges que nous avons eus avec la BGFIBank, que vous avez bénéficié de cette dernière, en décembre 2013, d’un paiement de 42.999.699,05 USD, paiement imputé au compte ouvert au profit de la Banque Centrale du Congo, auprès de cette même banque », dit l’Inspecteur en chef dans sa lettre, dont une copie exclusive est parvenue à POLITICO.CD.  

« Pourtant, votre société ne détenait aucune créance sur la Banque Centrale du Congo et que le nantissement de 64.385.487,28 USD acquise auprès de la société MW AFRITEC, en mai de la même année, ne reposait sur aucune facture dûment approuvée et certifiée. Le paiement dont vous avez bénéficié est par conséquent indu et constitue au contraire un détournement des deniers publics, dans la commission duquel la responsabilité de votre entreprise sera déterminée par les instances judiciaires compétentes », détaille M. Alingete.

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Toutefois, selon des documents consulté par POLITICO.CD en exclusivité, l’affaire ne va pas dans le sens de l’accusation. Selon des sources exclusives proches du dossier, l’argent, qui a bel et bien quitté le compte de la banque centrale logé à la BGFI BANK, n’a jamais atterri au contre de la société EGAL. L’IGF, qui s’est y sérieusement attelée, confirme cette version.  Dans une autre correspondance, datée cette fois du 5 avril 2021, l’Inspection indexe désormais la BGFI Bank. A l’issue de ses séances de travail avec les responsables de ces sociétés, l’IGF affirme que BGFI Bank « n’a pu établir de manière irréfutable la destination » de 42.999.699,05 USD. Sortie du compte « Banque Centrale du Congo Équipement », cette importante somme a échappé au Trésor public congolais après 4 virements à un « compte séquestre » porteur de plusieurs numéros « pour brouiller les pistes ».

Pour l’IGF, le « compte séquestre » dans lequel les 42.999.699,05 USD ont été versés « ne pouvait être mouvementé que par la BGFI Bank elle-même et, en aucune façon, la société EGAL SA. « Raison pour laquelle cette dernière a été mise hors cause dans l’accusation de financement sur base des fonds publics qui avait été portée contre elle ».

« Au stade actuel des choses, il se dégage que l’Etat congolais a perdu le montant USD 42.999.699,05 sortis du compte +Banque Centrale du Congo Equipements +et la responsabilité incombe à la BGFI-BANK DRC », souligne Julien Alingete dans cette lettre adressée cette fois à la Madame l’Administrateur-Directeur Général de cette banque.

L’affaire remonte d’il y a 8 ans. Dans ses constations, l’IGF note que sur la période allant du 18 juillet 2013 au 6 novembre 2013, un montant total de 42.999.699,05 USD, a été transféré de la Rawbank vers la BGFI Bank, par la Banque Centrale du Congo, pour être logé dans le compte 70010285011-72 intitulé « Banque Centrale du Congo Équipements » ouvert dans les livres de la BGFI Bank. Cet argent, renchérit l’IGF, a été par la suite viré du compte « Banque Centrale du Congo Équipements » au crédit du compte séquestre n° 45191026110-13 USD ouvert au nom de la société EGAL SARL, virement exécuté en quatre tranches, par les agents Kusombi Hervé et Diop Abdel Kader.

BGFI Bank, éternel suspect ?

En 2016, des révélations fracassantes sur la RDC étaient à la Une du quotidien belge « Le Soir ». Au cœur de ces révélations, il y avait une banque, la BGFI. Dirigée par un « ami d’enfance » de Joseph Kabila, Francis Selemani Mtwale, un très proche qui a grandi avec lui pendant les années d’exil en Tanzanie. Parmi des documents rendus publics par le quotidien belge Le Soir, l’un montrait par exemple que l’un des comptes de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) du Congo, qui abritait de l’argent destiné à financer des élections en RDC, a été régulièrement ponctionné, et cela dans des conditions très louches.

Un autre scandale révélé par l’enquête était celui de la GECAMINES, la plus grosse compagnie d’État congolais, qui est dirigée par Albert Yuma. Cette société a ouvert une ligne de découvert de 30 millions de dollars, toujours auprès de la BGFI qui revient systématiquement dans cette affaire. Et surprise, les intérêts remboursés par la Gecamines ont été prélevés à deux reprises par la banque. Il y avait donc toute une série de révélations de ce type, éclaboussant la BGFI Bank.

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