Ituri: Jean Bamanisa sur la sellette, l’opinion s’enflamme

En Ituri, le Gouverneur Jean Bamanisa Saidi et son Gouvernement sont sur la sellette. Ils vont être jugés par l’organe délibérant de cette province. Visé par une nouvelle motion de censure initiée contre lui après la récente crise politique née d’une première motion initiée par le même député provincial Louis Adaba Masumbuko, Jean Bamanisa jouera son va-tout ce mardi 13 avril afin d’échapper aux griffes de 48 députés provinciaux dont 20 sont signataires de la motion.

Un véritable bras de fer est désormais engagé entre l’exécutif et l’Assemblée provinciale de l’Ituri. « Nous irons droit au but. On ne peut pas accepter que toute une province de l’Ituri puisse être prise en otage », fulmine le Député Masumbuko, initiateur de la motion. Dans une interview accordée ce samedi 10 avril aux médias de Bunia, le motionnaire a appelé différentes bases électorales à se ranger derrière les 48 députés pour déchoir tacitement le Gouverneur Bamanisa et toute son équipe.

L’opinion s’enflamme

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Le Président de l’Assemblée provinciale notifie officiellement au Gouverneur Jean Bamanisa, samedi 10 avril, de la motion déposée contre lui. Quelques heures après, l’opinion s’est enflammée tant sur les réseaux sociaux que sur bien d’autres canaux.

D’après un proche de Jean Bamanisa, cette démarche s’inscrit dans le sens de la déstabilisation des exécutifs provinciaux. « C’est un sabotage de la part des élus provinciaux de l’Ituri qui ne contribuera nullement à la stabilité de la Province déjà secouée par l’insécurité et bien d’autres maux », regrette-t-il.

Luc Malembe, acteur politique, estime pour sa part qu’il faut réfléchir au mois deux fois avant de jeter l’Ituri, une province en guerre, dans l’inconnu. « Sans chercher à défendre le Gouverneur Bamanisa ni qui que ce soit, je voudrais inviter l’opinion à réfléchir froidement, sans passion ni fanatisme, sur l’incidence qu’une telle démarche peut avoir sur la situation sécuritaire de notre province, surtout en ce moment précis. Si tout le Gouvernement provincial arrive à tomber, il va se poser un problème d’intérim. (…) Connaissant la situation dramatique de notre province, avec la menace réelle d’une guerre ouverte qui pointe à l’horizon à Djugu et à Irumu, pouvons-nous courir un tel risque ? Le Secrétaire Exécutif, qui n’aura qu’un simple pouvoir d’expédition des affaires courantes, qui ne sera entouré presque de personne, et qui n’a jamais été préparé à assumer ce genre de fonctions, peut-il tenir le coup ? Aussi, qui sait combien de temps cette situation va durer ? » s’interroge-t-il.

« On risque donc d’attendre plusieurs mois, avec un intérimaire sans pouvoir à la tête de l’Ituri, une province à multiples problèmes sécuritaires qui méritent un minimum de gestion conséquente », estime Luc Malembe, qui pousse encore plus loin sa réflexion : « On peut voter cette motion et le Gouverneur refuse de déposer sa démission. Ni l’Assemblée provinciale, ni la Justice, ni personne ne saura le forcer à le faire, seulement le Président de la République. Or nous savons tous que ce qui préoccupe le Président Tshisekedi maintenant, c’est son histoire de Union sacrée. Ce sera donc un blocage pour nous tous. »

Jean Bamanisa a effectivement adhéré à l’Union Sacrée. Mais l’initiateur de la motion est membre de Lamuka, une coalition d’opposition. Les vingts élus de l’Ituri signataires de la motion ont retenu à charge du Gouvernement provincial:

  • La mauvaise Gouvernance et l’incapacité à restaurer l’autorité de l’État (l’inefficacité dans la recherche de la paix en Ituri, la faible collaboration avec les structures sociales et l’Assemblée provinciale pour la recherche des solutions aux problèmes de la province).
  • L’incapacité d’organiser les services provinciaux et de coordonner les services publics déconcentrés en province de l’Ituri.
  • L’affairisme, la gestion calamiteuse et opaque de la province de l’Ituri (la faible mobilisation des recettes de la province et leur mauvaise canalisation, l’opacité et le manque de transparence en matière de passation des marchés et de délégation des services publics en Ituri, l’anarchie dans la création des entreprises du portefeuille de la province et le financement occulte de leur fonctionnement.

Cette motion est la deuxième contre le Gouverneur Bamanisa depuis son accession à la tête de la province. En 2019, une motion de censure a été adoptée à la majorité des députés provinciaux présents lors d’une séance plénière tenue le 20 novembre. Sur les 28 députés présents, 27 avaient voté pour la motion. Contre toute attente, le 7 février 2020, la Cour constitutionnelle avait réhabilité Jean Bamanisa au poste de Gouverneur de la province de l’Ituri.

Dans son arrêt, la Cour avait estimé que la motion de censure adoptée le 20 novembre 2019 par l’Assemblée provinciale de l’Ituri contre le Gouverneur de province Jean Bamanisa Saidi violait la Constitution de la République Démocratique du Congo et l’avait déclaré, par conséquent, «nulle et de nul effet».

Serge SINDANI
@sergesindani01 | POLITICO.CD

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