Minembwe : Filimbi exige la démission de Monsieur Ruberwa « dont l’implication partisane dans cet acte irrégulier n’est pas à démontrer »

Dans son communiqué du 08 octobre 2020, le mouvement citoyen Filimbi a réagi sur le dossier de l’installation du bourgmestre et bourgmestre adjoint de la commune rurale de Minembwe et exige la démission de Monsieur Ruberwa dont l’implication partisane dans cet acte irrégulier n’est pas à démontrer.

Voici l’intégralité de ce communiqué signé par Floribert Anzuluni, coordonnateur de Filimbi et Carbone Beni, son chargé de réseau et déploiement.

Nous avons suivi avec la plus grande attention l’installation officielle des animateurs administratifs de la commune de Minembwe qui a eu lieu, le 28 septembre 2020, en présence d’une très forte délégation d’officiels, dirigée par l’actuel ministre de la Décentralisation et Réformes Institutionnelles, Monsieur Azarias
Ruberwa.

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Ce dernier était accompagné du ministre de la Défense, du Chef d’Etat-major Général de l’armée, du Gouverneur de la province du Sud-Kivu, et de plusieurs députés nationaux et autres autorités publiques provinciales et nationales dans le cadre d’une « caravane de la paix ».

Pour rappel, Monsieur
Ruberwa était à la tête de la branche politique du mouvement politico-militaire « Rassemblement
Congolais pour la Démocratie (RCD) » lorsque cette organisation, dont la branche armée contrôlait la
province du Sud-Kivu, avait anarchiquement créé le territoire de Minembwe qui englobait plusieurs entités
des territoires de Fizi, Mwenga et Uvira.

L’érection dudit territoire ayant été fortement contestée par la grande
majorité de la population locale, elle avait été dissoute à la suite de la signature des Accords de de paix de
Sun City qui avaient consacré la réunification du pays.

Aujourd’hui encore, l’installation des animateurs de la
commune de Minembwe, vraisemblablement précipitée, est à la base d’une très forte polémique et de
plusieurs contestations politiques et citoyennes.

Une situation qui est accentuée par le fait qu’une délégation
de diplomates occidentaux conduite par l’ambassadeur des Etats-Unis en RDC, Mike Hammer, s’est également rendue à Minembwe au cours de la même période.

Pour rappel, dans notre dernier communiqué daté du 23 juillet 2020 condamnant les massacres des populations civiles survenus les 16 et 17 juillet 2020 à Kipupu, nous avions alerté sur le fait que l’officialisation de la commune de Minembwe, à travers notamment la désignation des représentants administratifs, est à ce jour l’une des principales causes de la recrudescence des violences dans le territoire de Fizi, plus précisément à Minembwe et ses environs, entre les différentes milices armées communautaires. La création de ladite commune, via le décret-loi n°013/29 du 13 juin 2013, est considérée, par les autres communautés
du territoire de Fizi, comme frauduleuse, car n’ayant pas respecté la procédure légale.

En outre, nous avions
aussi rappelé, que cette opposition est également due au fait que dans la province du Sud-Kivu, depuis la
guerre d’invasion de 1997 portée par le Rwanda, la question liée à la communauté « Banyamulenge » est à
la base de plusieurs graves crises, notamment parce que les autres communautés estiment que ces derniers feraient partie d’un plan de balkanisation d’une partie de l’Est de la RDC en complicité avec le Rwanda et divers intérêts économiques internationaux.

Notre interpellation, pourtant non partisane, nous a valu des
attaques violentes sur les réseaux sociaux de la part des personnes mal intentionnées, vraisemblablement
proches de la communauté « Banyamulenge ».

Moins de trois mois plus tard, le tollé général de tout bord qui a suivi la récente cérémonie d’installation des animateurs administratifs de ladite commune conforte notre analyse de la situation.

Au regard de fortes tensions liées à la création de la commune de Minembwe, et des violents conflits, y compris armés, qui en découlent, son officialisation par défi ne permettra en aucun cas de ramener la paix,
au contraire !

En outre, au-delà de toute autre considération, et à la suite d’une analyse juridique minutieuse, effectuée en collaboration avec un compatriote juriste congolais, Monsieur Engunda Ikala, de la procédure ayant abouti à la création de la commune de Minembwe, il apparaît assez clairement que cette
dernière a été (volontairement ?) érigée de manière illégale pour les raisons objectives ci-après :

Suivant la loi organique n°08/16 du 7 octobre 2008 portant composition, organisation et fonctionnement des Entités Territoriales Décentralisées (ETD), la commune est une subdivision de la ville ou de toute agglomération ayant une population d’au moins 20.000 habitants à laquelle
un décret du Premier ministre aura conféré le statut de commune ».

Le deuxième alinéa de ce même article précise que « ce décret est pris sur proposition du Ministre de la République ayant les affaires intérieures dans ses attributions, après avis conforme de l’Assemblée Provinciale ».

Un avis qui doit être précédé par une consultation des communautés locales et une enquête de viabilité permettant, entre autres, de confirmer le nombre d’habitants ainsi que l’existence d’un minimum d’infrastructures sociales pouvant faciliter le fonctionnement d’une telle entité.

En 2012, le Premier Ministre de l’époque, Monsieur Adolphe Muzito, a pris plusieurs Décrets créant des villes et communes dans dix provinces du pays. Pour la province du Sud-Kivu, la commune de Minembwe n’avait pas été inclus, notamment parce que les différentes
communautés locales ne s’étaient pas accordées.

En 2013, le Premier Ministre Matata a pris le Décret n°13/029 du 13 juin 2013 conférant le statut de ville et de commune à certaines agglomérations de la province du Sud-Kivu qui stipule en son article 8 (10) que « le statut de Commune est conféré aux agglomérations et citées suivantes de la province du Sud-Kivu : Agglomération de Minembwe – Commune de Minembwe ».

Cependant, compte tenu notamment des contestations sur les limites de certaines villes et communes, le compte rendu de la 44è réunion extraordinaire du Conseil des ministres du mercredi 22 juillet 2015, nous renseigne que le Gouvernement avait décidé la surséance à l’exécution des Décrets du 13 juin 2013 dans toutes leurs dispositions. Et en application de cette décision, le Premier Ministre a pris le Décret n° 15/013 du 22 juillet 2015 portant surséance de l’exécution de certaines dispositions des Décrets concernés.

En 2018, le Premier ministre Tshibala Bruno a pris le Décret n°18/020 du 30 mai 2018 portant levée de surséance de l’exécution des dispositions, notamment, du Décret n°13/029 du 13 juin 2013 ayant créé la commune de Minembwe.

Ensuite, le vice-Premier ministre et Ministre de
l’Intérieur et Sécurité, Monsieur Mova Sakanyi Henri, a pris le Décret ministériel n°25/CAB/VPM/MININTERSEC/HMS/075/2018 du 20 novembre 2018 portant désignation et affectation à titre intérimaire d’un Bourgmestre, Monsieur Mukiza Nzambinesha Gabi, et d’un Bourgmestre adjoint, Monsieur Esumbico Sadiki Charles, dans la commune de Minembwe.

Ce sont donc ces désignations qui ont été récemment officialisées.

Néanmoins, il sied de rappeler, comme indiqué plus haut, que l’une des conditions préalables
pour créer une « Commune » est d’obtenir un avis conforme de l’Assemblée Provinciale. Et à ce sujet, le Décret n°13/029 du 13 juin 2013 conférant le statut de commune à l’agglomération de Minembwe nous indique dans ces visas qu’elle découle de l’avis conforme de l’Assemblée Provinciale du Sud-Kivu se rapportant à la proposition du Gouverneur de la province du Sud-Kivu du 09 juin 2009 relative à l’érection de certaines agglomérations de la Province du Sud-Kivu en Communes, contenu dans la décision n°09/200/PLEINIERE/ASPRO/SK du 07 octobre 2009.

Au regard de cette information, nous nous sommes donc procuré ladite recommandation qui, à notre très grande surprise, n’inclut pas la commune de Minembwe sur la liste des communes recommandées par l’Assemblée Provinciale.

Par conséquent, force est de conclure que la
création de la Commune de Minembwe par le Décret n°13/029 du 13 juin 2013 conférant le statut de commune à l’agglomération de Minembwe est non conforme à l’article 46 al.2 de la loi organique n°08/16 du 7 octobre 2008 portant composition, organisation et
fonctionnement des Entités Territoriales Décentralisées et leurs rapports avec l’Etat et les provinces du fait de l’absence d’avis conforme de l’Assemblée Provinciale.

De ce qui précède, nous soutenons l’abrogation du décret-loi n°13/029 du 13 juin 2013 conférant
le statut de commune à l’agglomération de Minembwe annoncée par le Président de la République et exigeons la démission de Monsieur Ruberwa dont l’implication partisane dans cet acte irrégulier n’est pas à démontrer.

L’impunité, le déni de Vérité et de Justice ne permettront jamais de mettre un terme aux
cycles de violences.

Nous condamnons avec la plus grande énergie tous les actes de violences commis et appelons les
différentes communautés locales à privilégier l’utilisation des moyens non violents dans la résolution des conflits qui les opposent.

Thierry Mfundu

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