Et si la RDC quittait la Francophonie?

La République Démocratique du Congo (RDC), le plus grand pays francophone du monde par sa population, se trouve aujourd’hui à un carrefour critique dans ses relations avec l’Organisation internationale de la francophonie (OIF).

Au cœur de cette remise en question se trouve un paradoxe troublant : la France, pilier de la francophonie, soutient ouvertement le Rwanda, pays accusé d’agresser et de piller les richesses de la RDC. De plus, l’ascension de Louise Mushikiwabo, rwandaise dont le pays adopte l’anglais comme langue officielle, au poste de Secrétaire générale de l’OIF avec le soutien de la France, ajoute une couche d’ironie à la situation.

La décision de Kinshasa de ne pas célébrer la Journée internationale de la francophonie le 20 mars dernier révèle l’ampleur des tensions. Cette abstention, annoncée par le ministère des Affaires étrangères, souligne une volonté de « jeter un regard critique sur l’appartenance de la RDC à la communauté francophone ».

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Patrick Muyaya, porte-parole du gouvernement congolais, exprime clairement cette frustration en évoquant la possibilité de quitter l’OIF, signalant ainsi une potentielle remise en question de l’engagement de la RDC envers la francophonie.

La situation est d’autant plus complexe que la Francophonie ne se réduit pas à une simple affaire linguistique; elle représente également une communauté de valeurs fondamentales telles que la paix, la démocratie, l’État de droit, et la solidarité. La RDC se sent trahie par l’indifférence perçue de l’OIF face aux agressions du Rwanda, également membre de l’organisation. Ce silence est vécu comme une contradiction flagrante avec les principes même de la Francophonie, conduisant à une profonde réflexion sur la pertinence de son appartenance à cette communauté.

Cette crise ne survient pas sans une prise de conscience du rôle pivot que la RDC joue et continuera de jouer au sein de l’espace francophone, surtout à l’horizon 2050, où elle devrait compter plus de cent millions d’habitants. La langue française, bien qu’étant la langue des élites, est parlée couramment par 50% de la population. Ce constat renforce l’idée que la menace de quitter l’OIF pourrait être davantage un moyen de pression pour obtenir une réaction de l’organisation plutôt qu’une intention réelle de rompre les liens.

La Francophonie institutionnelle se trouve ainsi dans une position délicate, appelée à naviguer entre les exigences politiques de ses membres et les principes qui la fondent. L’invitation puis la désinvitation de Louise Mushikiwabo aux 9e Jeux de la francophonie organisés par la RDC en juillet 2023 témoignent de cette tension et de la complexité des relations au sein de l’OIF.

Face aux critiques, la porte-parole de l’OIF, Oria Vande Weghe, rappelle que l’action de l’organisation dépend du consensus de ses États membres et non d’une initiative propre de la Secrétaire générale ou du secrétariat. Cette réponse met en lumière la structure de l’OIF et le rôle que les États membres doivent jouer pour adresser les enjeux politiques.

L’avenir de la RDC au sein de la Francophonie reste incertain, reflétant les défis et les contradictions de la diplomatie moderne. Cette situation illustre la complexité des relations internationales où les valeurs partagées se heurtent souvent aux intérêts politiques et économiques.

La décision finale de la RDC pourrait bien redéfinir non seulement son avenir dans la francophonie mais aussi influencer la trajectoire de cette communauté linguistique et culturelle globale.

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