RDC : « la Tshopo n’est pas à vendre », une apologie du « tribalisme » qui prend forme à Kisangani ?

« La Tshopo aux Tshopolaises et Tshopolais », « la Tshopo n’est pas à vendre », ces expressions explosent la toile et les sphères sociopolitiques de Kisangani, ville pourtant considérée comme « hospitalière », selon des anciens notables qui ont vécu la grande orientale démembrée. Celles-ci sont interprétées par des plateformes, portant ces expressions comme des dénominateurs, dont les unes ont marqué Jeudi 11 novembre 2021 leurs sorties officielles à l’esplanade de la grande poste, non loin de la place des Martyrs, lieu historique érigé en plein centre-ville de Kisangani.

Concepts nés dans un contexte préélectoral

Après l’éclatement de la grande orientale, en 2015, la Tshopo demeure dans une impasse sociopolitique. Des routes en desserte agricole quasi inexistantes, la voirie de Kisangani délabrée, disette d’électricité et de l’eau. Trois gouverneurs se sont tour à tour succédés avec des programmes non matérialisés suite à des crises notamment politiques. Des analystes, abordés par POLITICO.CD, estiment que face à ce tableau désastreux, la Tshopo sombre et tire les conséquences du démembrement des provinces.

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Cependant, à l’aube des nouvelles élections des gouverneurs et Vice-gouverneurs des provinces à problème, tout chamboule. La Tshopo, plus grande province en RDC, avec une superficie de 199 567 km², est en ébullition. Des discours sur des origines jugés « tribalistes » font la bombe au grand public et sur la toile. Des concepts non usuels apparaissent dans l’académie Boyomaise. « La Tshopolité », comme pour dire, la gouvernance de cette province ne doit qu’appartenir aux Tshopolais de père et de mère. Une liste a même été publiée dans les réseaux sociaux, le mois d’août dernier, où l’on pouvait répertorier des noms des politiques et prétendants candidats gouverneurs avec de mention sur leurs origines (100% Tshopolais, soit 50 % et ou, 25 %).

Aujourd’hui, POLITICO.CD remarque qu’après le dépôt des candidatures de certains postulants au poste du gouverneur de province, la Tshopo est en branle. Du tohu-bohu germe. « Tshopo réveille-toi », « Tshopo n’est pas à vendre », voilà des allégories dithyrambiques jugées « tribalistes » qui prennent forme à Kisangani.

Ces concepts, constatent plusieurs analystes indépendants, sont lancés dans un
contexte purement préélectoraliste, où l’ambiance est dominée par « des calomnies à outrance, les appels récurrents à la xénophobie, à la haine tribale, à la division », d’abord au travers les réseaux sociaux et aujourd’hui par les médias.

« C’est un climat d’animosité entre protagonistes et
surtout entre partisans des différents camps,
suite notamment à une montée en flèche des discours tribalistes, sans précédent, ont
ravivé la flamme de division et d’exclusion entre non seulement les différentes couches de la population Tshopolaise, mais plus grave, entre différents tribus et territoires qui composent la Tshopo », explique Mateus Kanga, un jeune leader du mouvement citoyen Parlement Debout.

« Ces sont des hommes bien connus en connivence avec des officines obscures (dont certains prétendants candidats Gouverneurs en panne des
stratégies pour convaincre leurs électeurs, les députés provinciaux), qui prêchent au
grand jour le concept la TSHOPO N’EST PAS A VENDRE, comme pour dire qu’ils ont
des éléments fiables attestant des démarches pour la mise en vente de la Tshopo et
surtout des textes légaux qui leur font croire qu’une telle démarche est possible », regrette-t-il.

« Union sacrée contre « les antivaleurs »

Dans la Tshopo, une frange de la jeunesse se dit « révoltée » par l’attitude quasiment passive des autorités politico-administratives et sécuritaires. Réunie au
sein d’une structure dite de l’Union Sacrée Contre les antivaleurs à la Tshopo (USACAT), cette dernière a décidé de monter au créneau, pour non seulement interpeler les autorités sur le
danger d’un feu latent qu’elles laissent allumer, mais aussi pour prendre l’engagement « de barrer la route à tous les politiciens véreux, déguisés en
notables et serviteurs de Dieu, qui comme d’habitudes veulent une fois de plus sacrifier la Province suite à la mauvaise posture dans laquelle ils se retrouvent
aujourd’hui sur la scène politique ».

Cette structure fonde sa prise de position sur l’appel du Chef de l’État Félix Tshisekedi au cours d’une réunion des ministres. « Cette attitude de la Jeunesse Tshopolaise n’est autre qu’une réponse positive au
vibrant appel du Chef de l’Etat, son Excellence Felix Tshisekedi, qui, dans sa communication en conseil des Ministres du 22 Octobre dernier, avait avoué
que le tribalisme est l’une des causes majeures de l’inversion des valeurs et de la
ruine de la RDC (Tshopo y compris) et avait demandé à ce que soit dénoncé publiquement tous ceux qui font l’apologie du tribalisme », a-t-on lu dans leur déclaration parvenue à POLITICO.CD.

Dans la foulée, cette structure « des jeunes contre les antivaleurs » alertent les services de sécurité et mettent en garde tous les acteurs politiques actifs dans la province de la Tshopo, à cette heure cruciale des élections des gouverneurs et vice-gouverneurs.

« Au service des sécurités, particulièrement à l’Agence National de Renseignement, de se conformer à l’instruction du Chef de l’Etat, qui avait demandé
à ce que soient identifiés les auteurs des déclarations tribales et de les mettre à la
disposition de la justice pour qu’ils répondent de leurs actes, conformément à l’ordonnance loi n°66342 du 7 Juin 1966, portant répression du racisme et tribalisme », poursuit-elle.

Et de lancer : « l’USACAT exhorte les députés provinciaux de la Tshopo à ne pas se laisser embourber par des discours moyenâgeux des loups déguisés en agneaux, de se remémorer de toutes les humiliations qu’ils ont subie hier de la part des mêmes
personnes et leurs acolytes et surtout de sanctionner sévèrement tous les candidats qui sont des mèches d’une manière ou d’une autre avec l’un d’entre-eux ».

Signalons que la Tshopo, province à problème, aligne au moins 8 prétendants candidats au poste de gouverneur de province dont deux femmes. Ces derniers ont commencé à se bousculer mettant en place de part et d’autres des brigades communicationnelles à leur faveur notamment dans les réseaux sociaux. Ainsi, la toile Tshopolaise se déchire.

Serge Sindani

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