« Nini tosali te ? », le cri de détresse des jeunes congolais

Scandale géologique, pays continent, pays-solution, paradis terrestre, tant d’expressions pour désigner un pays mine d’or mais aux populations extrêmement pauvres. Plus grand pays d’Afrique subsaharienne, avec une superficie équivalente à celle de l’Europe de l’Ouest, la République démocratique du Congo est dotée de ressources naturelles exceptionnelles. Outre sa richesse en minerais (cobalt et cuivre notamment), le pays dispose d’un grand potentiel hydroélectrique, de vastes terres arables, d’une formidable biodiversité et abrite la deuxième plus grande foret tropicale au monde.

Cependant la pauvreté reste « très répandue » en RDC : le pays se situe au troisième rang mondial pour le nombre de pauvres et la situation s’est encore aggravée à la suite de la pandémie de COVID-19. Selon les estimations de la Banque Mondiale, 73% de la population congolaise, soit 60 millions de personnes vivent avec moins de 1,90 dollar par jour depuis 2018 (niveau fixé comme seuil de pauvreté internationale. Ainsi, la Banque Mondiale révèle même que près d’une personne sur six en situation d’extrême pauvreté en Afrique subsaharienne vit en RDC.

Plusieurs régimes politiques ont défilé mais la situation sociale de congolais reste inchangée. « Nini tosali te », entendez : que n’avons-nous pas fait ? C’est en tout cas la grande question que pose le groupe « MPR » (Musique Populaire de la Révolution), à travers leur nouveau tube. En quatre minutes et quarante-quatre secondes, Yuma Dash et Zozo Machine, le duo « MPR » évoque, avec des mots simples, des maux qui révoltent.

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Que n’avons-nous pas fait ?

Plus qu’un cri d’alarme ! Le duo « MPR » se pose en alarmiste avec des larmes de mots qui peignent un tableau larmoyant d’une jeunesse qui se cherche, encore et encore. Yuma Dash et Zozo Machine parlent de jeunes congolais. Leur réalité. Surtout leur ras-le-bol. Dans cette chanson aussi poignante, les artistes tentent de traduire en mieux tout ce qui ronge la jeunesse congolaise.

« Soixante et un d’indépendance mais nous sommes toujours à la traine. Est-ce le déluge qu’avait prévenu Mobutu Sese Seko ? Je ne suis plus très enthousiaste quand il faut aller voter. Elections ou pas, c’est pareil ! La famine nous colle à la peau comme une seconde nature. L’insécurité est partout dans nos quartiers. Nous avons perdu le goût du petit déjeuner. Les députés au parlement passent le plus clair de leurs temps à festoyer. La vie de congolais est comparable au combat d’Ali et Foreman. On dit qu’on est un « pays riche », certes dans les faits, la réalité est tout autre. Nous avons fait toutes sortes de prières et pourtant Dieu nous ignore », chante le MPR.

Yuma Dash et Zozo Machine en veulent aussi aux politiciens. « La plupart d’hommes politiques sont sans vision ils font beaucoup de promesses, une fois qu’ils trouvent leurs comptes, ils vous tournent le dos. Nos larmes reflètent notre mode de vie et tout au long du temps notre sourire masque un profond mal-être. Etudier, nous l’avons fait. Jeûnes et prières, nous les avons faits. Nous avons même défait les liens de famille. Lutter et persévérer, nous les avons faits. Mais que nous n’avons pas fait ? », S’interrogent-ils.

Tonnerre d’applaudissements

Depuis la sortie officielle de ce titre qui se veut un véritable SOS, il s’observe une avalanche de réactions sur la toile et principalement sur Twitter. « Jamais déjà leurs textes, leur rythme, leur esthétique. Mais ce titre est dune puissance inégalée », écrit Dominique Tchimbakala.

Pour Seth Kikuni, cette chanson « décrit la condition du jeune congolais ». Il invite les jeunes à décider collectivement : « chers jeunes, vous êtes la solution à tous nos problèmes. Il suffit simplement de vous décider collectivement et les murs tomberont ».

« Le MPR est parvenu ce jour à faire le buzz sur la toile en mettant en scène avec brio le désespoir de notre jeunesse qui se meurt », commente Adam Chalwe.

Vidiye Tshimanga, proche du Président, voit en filigrane de cette chanson, « la raison de son combat, le sens de sa vie. Œuvre artistique limpide et percutante. Ode à la réalité. Interpellation simple et profonde. A nos mamans, à nos papas, à nos enfants. Bravo l’artiste ».

Stéphie MUKINZI

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