Sénat : affaire Bukanga Lonzo, le réquisitoire du PG près la Cour Constitutionnelle visant Matata et Kamonji sera examiné ce vendredi

Le Sénat va examiner ce vendredi 04 juin en plénière, le réquisitoire du Procureur général près la Cour Constitutionnelle au sujet du dossier Bukanga Lonzo. Dans ce réquisitoire Mukolo Nkokesha Jean-Paul demande aux sénateurs d’autoriser les poursuites judiciaires à charge de deux sénateurs à savoir Augustin Matata Ponyo à l’époque Premier Ministre et Kamonji Maserwa Ida à l’époque Directrice Générale de la société d’aménagement et de gestion du Parc Société Parcagri SA, l’une des trois sociétés du groupe Parc Agro-Industriel de Bukanga Lonzo.

Ce réquisitoire s’appuie sur le rapport accablant de l’Inspection Générale des Finances (IGF) publié exclusivement par POLITICO.CD, qui révèle plusieurs griefs à charge du Sénateur et ancien Premier Ministre Augustin Matata Ponyo, dans la débâcle du Parc agro-industriel de Bukanga Lonzo. Au terme de ce rapport, Augustin Matata est désigné comme « l’auteur intellectuel de la débâcle de ce parc ». Et cela à travers la conception, la planification et les engagements pour paiement de plus de 83% de fonds décaissés directement au profit des comptes du partenaire sud-africain et de ses filiales logés en Afrique du Sud, ainsi qu’au profit de la société MIC Industries.

Ledit rapport pointe le Docteur Matata Ponyo également dans le choix du partenaire sud-africain Africom qui n’avait que trois ans d’existence au moment de la signature du contrat de gestion et de ses filiales. Et ce, en violation des procédures de passation des marchés publics, spécialement les articles 17 de la loi N°10/010 du 27 avril 2010 relative aux marchés publics.

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Dans son requisitoire, le Procureur général près la Cour constitutionnelle affirme par ailleurs que « le choix d’Africom commodities ne semble pas si innocent puisque le Sénateur MATATA PONYO MAPON a, dans la même période de démarrage du projet et à travers deux membres de sa famille à savoir, Madame KACHOKO MBONDA Hortense dite son épouse et Monsieur MATATA SHWITI-LYA MBEMBA Edouard, constitué la Société dénommée Feed Africa SARL, comportant dans son objet les activités agricoles et cela, dans la concessionmême du Parc Agro-Industriel de Bukanga Lonzo. »

Les autres associés sont M-POWER GROUP (Pty) Limited, société de droit Sud-africain représenté par Monsieur GROBLER Christo, Administrateur du partenaire Sud-africain Africom Commodities et MICHIGAN FARMING représenté par Peter VENTER, l’autre Administrateur d’Africom Commodities. « Plus tard, cette Société Feed Africa de la famille MATATA se retrouvera avec la même société Africom Commodities SARL aux côtés de Jivento Group SARL et Agri-Kwango SARL encore à identifier, dans une autre société dénommée « LONZO NATURAL RESOURCE (LNR SARL) » ayant essentiellement pour objet la prospection, la recherche, l’exploitation, le traitement et les opérations connexes dont la commercialisation, des substance minérales valorisables », précise le Procureur.

Par ailleurs, les conclusions de l’IGF imputent au Premier Ministre honoraire le détournement constaté de 7.392.162.577 CDF, l’équivalent de 7.989.408,08 USD pour l’achat de Ultimate Building Machine pour le compte du parc, alors que ce paiement n’a pas été reconnu par Africom, qui passait toutes les commandes des équipements, matériels et intrants agricoles. Cet équipement n’a jamais été livré au Parc en considérant le compte-rendu de la réunion de service du 4 mai 2017, présidée par le Directeur Général de Parcagri, Ida Naserwa.

Il est aussi reproché au Sénateur Matata, d’avoir initié et payé à la société Desticlox une somme de 510.883,84 USD au titre des frais de gestion, sans titre ni qualité dans le chef de ce dernier, car le prestataire qui avait signé le contrat de gestion avec l’État congolais est Africom. Un cas de détournement des fonds, conclut le rapport de l’IGF.

Un autre grief, c’est la complicité de détournement à travers les engagements et paiements des sommes au titre de libération du capital social au-delà du montant de la quotité due par l’État congolais dans les sociétés Parcagri SA, Separgri SA et Marikin SA. L’IGF accuse Augustin Matata de négligence coupable pour ne s’être pas rassuré des mécanismes prudentiels de garantie de bonne gestion par le partenaire. Ce qui a entraîné l’opacité dans la gestion par le partenaire sud-africain et la surfacturation des biens et services au point qu’Africom était le seul à déterminer les besoins en investissements, passait les commandes, fixait les prix et achetait les équipements, matériels et intrants, sans être mis en concurrence avec d’autres fournisseurs. Africom devenait ainsi juge et partie durant tout le cycle de vie du projet.

Enfin, le dernier reproche concerne aussi l’abstention coupable. Mais cette fois, c’est pour n’avoir pas mis en place des mécanismes minima pour garantir la surveillance dans l’utilisation des fonds décaissés par le Trésor public. Pour l’IGF, il aurait fallu mettre en place un service d’audit interne ou comité de suivi et de tenir la comptabilité sur place en RDC. Cette négligence a facilité la surfacturation.

L’Inspection Générale des Finances (IGF) reproche à la sénatrice Kamonji Maserwa Ida à l’époque Directrice Générale de la société d’aménagement et de gestion du Parc Société Parcagri SA, une des trois sociétés du groupe Parc Agro-Industriel de Bukanga Lonzo de n’avoir pas dénoncé « la gestion chaotique du projet ».

Selon le même réquisitoire du procureur général près la cour de constitutionnelle, la sénatrice a dit n’avoir eu à gérer que 895 902,75 USD provenant de la libération du capital social de Parcagri et 927 962 USD, subvention du Fonds de Promotion de l’industrie (FPI).

« Kamonji Maserwa Ida confirme la gestion opaque du projet et son audition sera à l’instruction du dossier d’une grande utilité, puisqu’elle a vécu ce qui s’est passé sur le terrain », souligne la note du PG Mukolo Nkokesha Jean-Paul.

Pour le premier réquisitoire, la chambre haute avait ssollicité d’avoir les plus amples détails auprès du Procureur Général près la Cour constitutionnelle. À cet effet, le procureur général près de la Cour Constitutionnelle avait une nouvelle fois saisi la Chambre haute du Parlement. Dans cette lettre du 15 mai consultée par POLITICO.CD, le Procureur évoque les articles 164 et 166 de la constitution qui attribuent la compétence pénale à la Cour constitutionnelle pour les infractions commises par le Président de la République et le Premier ministre dans l’exercice de leurs fonctions. « Après l’exercice de leurs fonctions, leur juge pénal reste la Cour constitutionnelle pour les actes commis pendant l’exercice de leurs fonctions », insiste le Procureur qui soutient que « votre saisine se justifie dans le cas du sénateur Matata Ponyo, non pas parce qu’il était Premier ministre, mais parce qu’il est sénateur ».

Dans la même correspondance, le Procureur Général près la Cour constitutionnelle précisait que les deux sénateurs ne sont pas poursuivis pour des actes commis en leur qualité de sénateurs, mais plutôt pour les actes commis en qualité de Premier Ministre pour l’un et de Directeur Général du Parc agro-industriel de Bukanga Lonzo pour l’autre. Il a martelé sur le fait que méconnaître une telle compétence pénale clairement établie par la constitution « serait une violation flagrante de celle-ci en son article 19, alinéa 1 qui stipule, nul ne peut être soustrait ni distrait contre son gré du juge que la loi lui assigne ».

Dominique Malala

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