RDC : À quoi jouent finalement Jean-Marc Kabund et l’UDPS ?

« C’est sans surprise pour moi. Ce passage en force du FCC est la preuve que le complot était ourdi et va au-delà de ma destitution. En vrai Tshisekediste, je quitte ce poste la tête haute et sans compromission. Fier d’avoir défendu notre idéal de combat, notre pouvoir et le PR ». Le 26 mai 2020, au soir d’une épique plénière où coups de poing et bagarre ont éclaté à l’Assemblée nationale, Jean-Marc Kabund encaisse en ces termes sa déchéance à l’issue d’un vote stalinien de 289 sur 315 voix.

Mais la tête de Kabund ne restera pas longtemps haute. Tel un lion privé de son lionceau, JM Kabund est revenu plus combatif que jamais. Dans une déclaration dont une copie est parvenue ce jeudi 28 mai à la rédaction de Politico.cd, Augustin Kabuya, au nom du président intérimaire du parti qui n’est autre que Kabund, réfute la décision de l’Assemblée nationale et affirme qu’il considère « inopportun » de désigner un autre parmi les députés au poste de premier vice-président de l’Assemblée nationale. Déjà avant la déchéance, Kabund et son Secrétaire général promettaient de faire s’arrêter le soleil en cas de destitution.

Kabuya prévient, par ailleurs, que tout député national élu de l’UPDS ou des alliés de l’UPDS qui violerait la résolution susmentionnée, sera considéré comme ayant délibérément quitté le parti et, de ce fait, sera sanctionné conformément aux dispositions pertinentes de la Constitution de la RDC, des statuts et du règlement intérieur du parti. Il autorise Jean Marc Kabund, dans le point 5 de sa déclaration, à saisir les instances judiciaires afin de rentrer dans ses droits, car selon eux, cette destitution viole de tout prescrit en la matière. Une décision toutefois rejetée par certains députés. Plusieurs annonceront d’ailleurs leurs candidatures.

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Cependant, dans un autre revirement, l’UDPS décide, finalement, de tourner la page Jean-Marc Kabund comme premier vice-président de la chambre basse du Parlement et désigne Patricia Nseya, députée nationale de l’UDPS. Le parti affirme alors que cette dernière a été choisie par Félix Tshisekedi himself pour remplacer Jean-Marc Kabund à l’Assemblée nationale. « Je ne fais rien sans me référer à ma hiérarchie. La hiérarchie m’a donné des instructions pour déposer la candidature de l’honorable Patricia Nseya. J’ai déposé sa candidature au nom du parti », a expliqué laconiquement Augustin Kabuya, le lundi 8 juin après avoir déposé la candidature de Mme Patricia Nseya.

Jusqu’où Kabund est-il prêt à aller dans son obstination ?

Coup de théâtre. Au lendemain de cette énième contradiction, Jean-Marc, l’homme qui partait la tête haute de l’Assemblée nationale, en dépit de la désignation de Patricia Nseya par Félix Tshisekedi pour le remplacer, décide d’introduire une requête au Conseil d’Etat pour faire annuler la procédure ayant conduit à sa déchéance. À travers ses avocats-conseils, Kabund sollicite auprès de cette haute juridiction sous la direction de Vunduawe Te Pemako, la surséance du calendrier publié par la présidente de l’Assemblée nationale, Jeanine Mabunda, pour l’organisation de l’élection et l’installation de son premier vice-président.

Ce mercredi 10 juin, le Conseil d’État a ouvert son audience en matière de réfèré-liberté opposant Kabund, Mabunda et consorts. Un bras de fer juridique est dès lors engagé.

Cette démarche invraisemblable de Kabund sur le plan judiciaire, sans le quitus de l’UDPS, apparaît pour beaucoup comme un défi, voire une rébellion contre Félix Tshisekedi qui a désigné ouvertement Patricia Nseya comme candidate à ce poste. Une décision qui est intervenue après des concertations avec les membres du Directoire dont Jacquemin Shabani et Victor Wakuenda, ainsi que le Secrétaire général, Augustin Kabuya.

Il faut toutefois noter que Kabund, qui est à Kinshasa, n’a pas daigné assister aux concertations initiées par le chef de l’État Félix-Antoine Tshisekedi ayant abouti à la désignation de Patricia Nseya. Ce qui fut un vrai camouflet pour l’élu de Mont Amba, d’autant plus que les membres du Directoire dont Victor Wakuenda et Jacquemain Shabani, y étaient aussi conviés par le chef de l’État, alors que Kabund les avaient destitués du parti.

Selon plusieurs sources au sein de l’UDPS, Jean-Marc Kabund aurait mal digéré le fait qu’après avoir été destitué parce qu’ayant défendu le chef de l’État sur la mesure de l’État d’urgence, il n’a pas bénéficié de l’appui du parti. Même si le secrétaire général de l’UDPS, Augustin Kabuya, tente de calmer le jeu en déclarant que sa démarche au niveau de la justice est en conformité avec la hiérarchie du parti, il y a lieu de penser que la décision du conseil d’État va forcément influencer l’attitude que va adopter Kabund à l’issue de ces événements. La situation de l’UDPS en dépend largement, tout comme l’avenir même du parti et sa cohésion.

Thierry Mfundu

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