Camper devant les bureaux jusqu’aux résultats: la tactique anti-fraude en RDC

Si les deux principales coalition d’opposition en République démocratique du Congo ont du mal à s’entendre, elles sont néanmoins d’accord sur une chose à faire: surveiller activement les opérations de votes et de dépouillement.

Au moins 40 millions de personnes sont appelées ce dimanche en République démocratique du Congo à élire un nouveau président et plusieurs députés dans des élections tendues. Malgré des inquiétudes, la Commission électorale nationale Indépendante (CENI) rassure que le vote aura lieu sur toute l’étendue du pays le dimanche 23 décembre, malgré des inquiétés. « Nous voterons le dimanche sur toute l’étendue du pays« , annonce une source à CENI. Selon elle, jusqu’à 60% du matériel supplémentaire déployé dans les provinces est déjà à Kinshasa. La capitale congolaise aurait en effet tout le matériel disponible sous peu, après l’incendie qui a ravagé un entrepôt de la Commission électorale.

L’opposition congolaise, qui est divisée en deux blocs, craint des fraudes de la coalition au pouvoir. Les machines à voter, longtemps rejetées mais finalement imposées par la CENI, pourraient aider à falsifier les résultats de votes. Toutefois, la CENI rassure que les résultats des machines ne seront pas pris en compte.

Des témoins formés

Devant la presse étrangère le vendredi 7 décembre à Kinshasa, Corneille Nangaa, président de la CENI,  a annoncé que les agents électoraux procéderont au dépouillement manuel de résultats, qui seront ensuite inscrits sur les procès verbaux, puis publiés. “Nous procéderons au dépouillement manuel des bulletins. Puis nous devrons transcrire les résultats comptés manuellement sur des procès verbaux. Ces résultats seront annoncés. Pas ceux des machines » a-t-il dit.

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Concrètement, l’électeur pourra utiliser la machine pour opérer son choix, qui sera ensuite imprimé sur un bulletin papier, avant que ce dernier ne soit déposé dans l’urne. Et donc, les résultats finaux seront notés dans des procès verbaux et des fiches des résultats, qui seront contre-signés par des témoins de toutes les parties et envoyés par la suite vers la Commission électorale.

Pour surveiller ce processus, la coalition de Félix Tshisekedi forme depuis plusieurs mois ses témoins.  « Nous avons lancé un programme de surveillance depuis un peu plus de trois mois avec des formations en cascades qui nous ont permit d’atteindre toutes les les provinces. Actuellement, nous sommes en train de nous rassurer que les témoins sont  formés et accrédités. Et tout vas bien, la formation continue jusqu’au 20 [décembre]. Après, nous allons nous assurer que ces témoins soient déployés« , relève Maître Jacquemain Shabani, également ancien Secrétaire général de l’UDPS.

LAMUKA et CACH d’accord

Dans une longue interview ce mercredi 19 décembre à POLITICO.CD, l’avocat congolais, qui fait également partie de la coalition CACH, estime que les deux coalitions d’opposition doivent unir leurs forces pour faire face à toute fraude probable. « Maintenant que les amis de LAMUKA ont suffisamment intériorisé toute cette question-là et qu’ils engagent des formations, et même s’il nous reste très peu de jours, mais je crois qu’il est encore possible pour que tous ensemble, puissions mutualiser nos efforts pour faire face à toute fraude électorale. C’est une question cruciale pour obtenir la vérité des urnes.  Je crois que c’est encore possible« , dit-il.

Composée principalement de Jean-Pierre Bemba et Moïse Katumbi, la coalition LAMUKA soutient la candidat de Martin Fayulu après des négociations qui ont échoué à Genève et qui ont vu Félix Tshisekedi et Vital Kamerhe se retirer et former leur propre alliance. Mt Shabani estime que les deux blocs de l’opposition ont le mérite d’avoir réussi à arracher la tenue de ses élections. « Nous n’avons pas réussi à identifier un candidat commun,  mais il faut considérer aussi qu’au delà des grandes victoires que nous avons obtenu, notamment le respect de la Constitution (…) les forces du changement ont gagné« , dit-il, avant d’ajouter: « Et donc moi je lance cet appel ici, nous pouvons mutualiser nos efforts. »

Camper devant des bureaux de vote

Un appel que soutient  Sindika Dokolo, président du mouvement citoyen des Congolais debout. « Pour des élections crédibles, la supervision du dépouillement de chaque bureau par tous les électeurs est le défi numéro 1« , a-t-il dit dans un tweet. « Félicitons la cohésion entre les différentes tendances de l’opposition pour garantir que le choix des électeurs congolais s’imposera à tous sans triche« , a ajouté le président du mouvement citoyen « Les Congolais débout »

De son côté, la coalition LAMUKA n’a pas encore répondu à cet appel. Cependant, dans une intervention à Jeune Afrique, Olivier Kamitatu, bras droit de Moïse Katumbi, avait également suggéré aux populations de camper devant les bureaux de vote jusqu’à la publication définitive des résultats. Un appel également réitéré par Jacquemain Shabani de la coalition CACH.  « Il faut que la population reste jusqu’à la fin du dépouillement dans chacun des 90 000 bureaux de vote. Et nous voulons, ensuite, des électeurs dans chacun des centres de compilation. Nous refuseront toute comptabilité électronique« , avait dit Olivier Kamitau.

Cette situation risque néanmoins d’occasionner des violence en cas de contestations massives de la population. En effet, la moyenne d’électeurs par bureau de vote est d’au moins 650 personnes. Le Vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur, Henri Mova, s’est exprimé sur les mesures qui vont être prises pour sécuriser les opérations de vote.  Selon lui, deux policiers seront théoriquement présents aux abords de chacun des quelques 75 000 bureaux.  D’autres seront déployés dans plusieurs sites jugés stratégiques ainsi qu’aux postes-frontière. Un nombre largement insuffisant pour faire face à des sérieuses protestations éventuelles.

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