Kande, le mouton noir

La destitution, ce mercredi 4 octobre, du gouverneur du Kasaï central Alex Kande, sonne le glas d’une longue et lente tombée en disgrâce.

« C’est l’histoire d’un homme qui tombe d’un immeuble de 50 étages. Le mec, au fur et à mesure de sa chute, il se répète sans cesse pour se rassurer : + Jusqu’ici tout va bien. .. Jusqu’ici tout va bien. .. Jusqu’ici tout va bien. + Mais l’important, c’est pas la chute. C’est l’atterrissage »

Cette longue maxime tirée du film « La Haine » du réalisateur Mathieu Kassovitz prend tout son sens dans l’histoire de l’homme politique Alex Kande Mupompa. Car jamais un homme n’aurait souhaité atteindre le fond d’une descente aux enfers dans sa vie.

Né à Kananga, le 23 septembre 1950, le gouverneur Alex Kande, cadre de la Majorité Présidentielle, s’est retrouvé en mai dernier dans la liste « très fermée » des neuf nouvelles autorités congolaises proches du président Kabila sanctionnées par l’Union Européenne.  Les européens accusent alors  ce diplômé en Sciences économiques appliquées de la Faculté Universitaire Catholique de Mons en Belgique, d’être responsable du recours disproportionné à la force, de la répression violente et des exécutions extrajudiciaires, qui sont le fait des forces de sécurité et de la PNC au Kasaï Central depuis 2016, y compris les assassinats présumés de miliciens Kamuina Nsapu et de civils à Mwanza Lomba, Kasaï Central, en février 2017.

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Contre toute attente, et alors que ceux des proches du Président congolais sanctionnés par l’Occident sont souvent et soudainement montés en grâce, Alex Kande ne bénéficie d’aucun soutien. Pire, sa longue tombée en disgrâce s’accentue. En réalité, plusieurs mois plutôt, l’homme n’est même plus proche de Joseph Kabila.

Dès mars 2017, alors que la crise dans la région du Kasaï prend des ampleurs internationales avec les assassinats de deux experts de l’ONU, Alex Kande est consigné à Kinshasa.  Aucune explication officielle ne sera fournie. Sur les ondes de Radio France Internationale en juin, soit juste après l’annonce des sanctions contre le gouverneur du Kasaï Central, Lambert Mende, le ministre de la Communication et des Médias, également porte-parole du gouvernement a clairement fait savoir qu’il pourrait s’agir d’une décision qui vise à remettre en cause la gestion de cette crise par Alex Kande.

Trophée d’une justice selective dans le dossier Kasaï

« Pourquoi pensez-vous que tout un gouverneur ait été contraint d’abandonner son poste de gouverneur et séjourne à Kinshasa? » interroge le ministre congolais à la question de savoir s’il n’y a pas eu de maladresse de la part des autorités dans la gestion de cette crise.

En effet, le conflit qui embrase la région du Kasaï aujourd’hui a éclaté à la mort de Jean-Prince Mpandi , chef coutumier Kamuina Nsapu, tué dans une opération policière, après un long bras de fer avec les autorités, y compris le gouverneur Alex Kande, qui refusaient alors de reconnaître son intronisation.  « Monsieur Kande est à la disposition de la justice pour cette question-là« , ajoute Lambert Mende. Pour lui, si Kande est à Kinshasa, c’est qu’il y a des questions auxquelles la justice congolaise aimerait obtenir de lui des réponses.

Les jours passent, Kande est soudainement autorisé à regagner Kananga. Cependant, alors que le pouvoir entame en grande pompe un forum de paix dans l’espace Kasaï, histoire de mettre définitivement fin au conflit sanglant, le gouverneur est le grand absent de ce rendez-vous.  « J’avais fait appel pour qu’il [Alex Kande] vienne. Il peut avoir ses raisons à lui mais je sais que, pour la paix, même à distance on peut collaborer« , se borne à expliquer le vice-ministre de l’Intérieur et Sécurité, Basile Olongo.

Brebis galeuse, mouton noir, Alex Kande est destitué ce mercredi 4 octobre à l’issue d’un vote expéditif qui s’installe à présent comme mode opératoire du pouvoir pour écarter ses épines. Ayant clamé haut et fort tenir à la justice dans le dossier Kasaïen, le président Joseph Kabila va peut-être faire, sans avoir tort, d’Alex Kande sa première prise d’une chasse sélective.

Litsani Choukran.

6 comments
  1. JP Bemba avait dit: « un jour vous diriez, si je savais? ». comment un Opposant comme A.Kande devait virer à 360° pour la MP , toujours dans le souci de devenir Gouverneur. De même que François MWAMBA qui a pu oser de se faire acolyte de J.Kabila mais il a fin par « faire le retour à la case des parents »(Le Rassop) comme l’enfant prodigue. Voilà le prix de la trahison, très humilié et confus.

  2. Voilà encore le nième intellectuel congolais qui avait vendu son Âme au Diable pour quelques poignées de dollars et qui a fait tuer ses propres frères par centaines….
    Shame on you. Fatou Bensouda t’attend!!!

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