Etrange « terrorisme » à Kinshasa

Des « terroristes » qui ne s’attaquent qu’à la Police, un gouvernement qui les qualifient de « bandits », une opposition politique qui en rit, une opinion publique qui y voit « complot »… chronique d’un terrorisme atypique au Congo. 

Vendredi dernier, une dizaine d’hommes armés de couteaux et de machettes ont fait irruption, sur le marché central de Kinshasa, la capitale de la République démocratique du Congo. Nous sommes en plein jour, à l’un des endroits les plus fréquentés de la ville. Ces jeunes gens, photographiés même, passent entre de commerçants qui s’entassent dans ce marché mythique; sans être inquiétés, et ne s’intéressant même pas aux vendeurs, ni aux nombreux civils dans le parage.

Ils se dirigent alors vers le bureau de la Police du marché, où siège également l’administratrice,  Chantal Mombi Mboyo. Ils la tueront, elle et son garde du corps. Ils brûleront aussi ce bureau et un autre situé non loin. Il s’agit donc d’une nouvelle attaque, en plein jour, sur Kinshasa. Au moins deux personnes seront tuées et six policiers blessés. Un mode opératoire identique à celui des autres attaques perpétrées essentiellement contre les bureaux de Police et les prisons congolaises.

En effet, le 29 juin, la veille de l’indépendance, un groupe de six hommes a également attaqué un commissariat de police dans le quartier fort fréquenté de Matonge. Cette attaque intervenait après celle du Parquet de Matete deux semaines plus tôt. Bien évidemment, tous ces assauts s’inscrivent dans la grande lignée des attaques de prisons à travers le pays, notamment celle du 17 mai contre le CPRK (ex-Makala).  Néanmoins, si l’attaque de la prison de Makala a semblé clairement être attribuée à la secte Bundu dia Kongo, du député Ne Muanda Nsemi, celles de bureau de police ont souvent été attribuées par les autorités  à “un groupe de bandits” armés.

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Cependant, pour la première fois, le Porte-parole du gouvernement, le ministre Lambert Mende a ouvertement parlé d’une attaque « terroriste ». « C’est un acte terroriste qui a frappé ce qu’on appelle communément le petit peuple. Le marché de Kinshasa n’est fréquenté ni par les politiciens, ni par les hommes d’affaires de très haut niveau, c’est vraiment le petit peuple » regrette le ministre congolais de la Communication et des Médias.

Néanmoins, si le terrorisme a pour principal objectif de faire peur, il convient de se demander: contre qui ce terrorisme s’adresse-t-il? Car, de toutes ses attaques, aucun civil n’a ouvertement été visé par les assaillants, alors que la majorité de victimes sont des éléments de la Police. De plus, les assaillants semblent s’attaquer à des symboles de l’Etat et libèrent de prisonniers.

Des auteurs introuvables

L’incendie au Commissariat de la Police à Limete (archives)

Outre ces faits, c’est l’opinion publique congolaise qui porte son lot de confusions dans cette affaire. A l’image de l’attaque de la prison de Makala, la plupart d’attaques sont étrangement accueillies au sein de la population, où beaucoup accusent le pouvoir d’en être le principal instigateur. Même son de cloche du côté de l’opposition congolaise, qui ne s’empêche pas de diffuser des photos de victimes, tout accusant le pouvoir de vouloir semer le chaos pour retarder les élections.

Une attitude qui agace le gouvernement. Joint au téléphone ce lundi par POLITICO.CD, le Porte-parole du gouvernement, le ministre Lambert Mende, dit penser qu’une « partie de la classe politique » congolaise se réjouisse de ses attaques qui visent des civiles à Kinshasa.

« Nous avons l’impression qu’il y a une partie de la classe politique qui encourage de tels actes, parce qu’ils sont désespérés de ne pas être arrivés à leur fin, de s’emparer du pouvoir par les moyens non-démocratiques, et que maintenant, ils appliquent une sortie de politique de la terre brûlée« , accuse le ministre congolais.

« Des enquêtes sont en cours et vont déterminer exactement d’où est parti ce coup du marché central (…) mais, la réaction timide d’une partie de la classe politique démontre bien qu’ils ont l’impression que ça sert leurs intérêts« , ajoute-t-il.

L’autre grande inconnue, c’est l’identité des auteurs. Si, dans la majorité de cas, les assaillants sont identifiés, grâce à leurs « bandeaux rouges sur la tête« , comme des partisans du députés Ne Muanda Nsemi, il semble néanmoins que les motivations restent floues. Il faudra ainsi noter que « les assaillants aux bandeaux rouges sur la tête » ont été vus à l’attaque du Commissariat de la police à Limete, en avril dernier; bien avant l’attaque de la prison centrale de Kinshasa ayant causé la libération et la fuite de leur leader. Laquelle attaque a été attribuée à des partisans du parti de l’opposition UDPS (Union pour la Démocratie et le Progrès Social)

Par ailleurs, les attaques de prison sont également constatées à l’intérieur du pays, notamment dans le Kongo-central, certes base traditionnelle du Bundu dia Kongo, mais aussi à Beni, au Sud-Kivu, à Kalemi, y compris dans le Bandundu.  Une cartographie qui remet en cause la participation d’un mouvement tribaliste comme celui du député Ne Muanda Nsemi.

2 comments
  1. Tous les signaux de cette mise-en-scene meurtriere poitent vers les milices de mercenaires-voyous a la solde de Kabila (alias, sa « garde republicaine » bidon).

    Ces terroristes ne different pas des « Bana Mura » a la solde de Kalev et Kabila semant la desolation inbue des massacres au Kasai. Tout cela va dans le but de justifier l’Etat d’Urgence et l’annulation des elections, ce au profit du maintien de l’imposteur au sommet.

  2. Depuis que les enquêtes ont commencé, jusqu’à ce jour les services de sécurités n’ont trouvé aucune source fiable, ni les véritables auteurs. ça cache quelque chose. C’est pourquoi une certaine opinion dit que ce sont les autorités elles-mêmes qui sont derrière tout cela pour semer le chaos et justifier leur probable état d’urgence. C’est la politique de la terre brûlée. LAMBERT le sait bien. Même le changement opéré à la tête de la police, c’est une mascarade pour donner l’impression à l’opinion de bien faire les choses

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