Furie contre le Pouvoir en RDC

Une véritable révolte. La Conférence épiscopale nationale du Congo (Cenco) a sonné une véritable révolte le 25 juin en République démocratique du Congo.  Réunis du 19 au 23 juin à Kinshasa dans le cadre de la 54e assemblée plénière ordinaire, les évêques catholiques ont peint un tableau très sombre de la situation au pays, tout en appelant le peuple congolais à la mobilisation.

« Le pays va très mal. Debout congolais ! Décembre 2017 approche ». « Le pays va très mal », scande ce long texte des catholiques.  « Nous sommes profondément inquiets et préoccupés par la détérioration continue de la situation économique, sécuritaire et humanitaire, ainsi que par l’impasse politique actuelle», disent les évêques.

Ils dénoncent la corruption, les évasions fiscales et le détournement des fonds publics par un groupe qui abuse du pouvoir ; avec pour conséquence la détérioration sans précédent de la vie sociale de la majorité des congolais. Les évêques soulignent en outre que « l’insécurité quasi-généralisée à travers le territoire national influe directement sur la vie des personnes ». Ils rappellent le lourd bilan humanitaire et matériel des affrontements dans le Kasaï (3.383 morts, 30 fausses communes, plus d’un million des déplacés internes et 30.000 réfugiés en Angola en neuf mois).

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La CENCO fustige le manque de justice, la restriction du droit à la liberté d’expression et l’interdiction de manifestions pacifiques, qui va jusqu’à un usage excessif de la force ; ainsi que les arrestations arbitraires des défenseurs des droits humains, des acteurs politiques et sociaux et de tous ceux dont la voix diverge de la pensée du pouvoir.

Bien plus encore, c’est les élections censées avoir lieu avant l’année en cours qui inquiètent. A moins de six mois, le processus électoral bat de l’aile. L’enrôlement des électeurs entamé dans la capitale congolaise aussi. A côté, la Commission électorale nationale n’a toujours pas publié le calendrier électoral tant attendu. Corneille Nangaa, son président, continue de réclamer notamment le Conseil national de suivi de l’accord et le financement.

Appels à la mobilisation

A ce sujet, la CENCO appelle la population à s’enrôler massivement en vue des élections qui doivent se tenir avant la fin de cette année, conformément à l’Accord de la Saint Sylvestre. Elle invite ainsi la Commission électoral Nationale Indépendante (CENI) à bien préparer l’organisation de ces élections.

Comme elle, et bien avant, des mouvements citoyens sont montés au créneau pour mettre la pression au Pouvoir. Le 9 juin, huit mouvements de lutte citoyenne pour la démocratie ont signé un communiqué commun, interpellant d’abord le peuple congolais, à qui ils demandent à ne « surtout pas se décourager et de continuer à se mobiliser pour neutraliser pacifiquement l’actuel régime illégal et illégitime au cas où ce dernier s’entêterait à ne pas organiser une alternance démocratique au plus tard en décembre 2017. »

A Goma, l’arrestation de quatre artistes-peintres a laissé place à une véritable colère. Benoît Mugabo Baritegera, un de ces jeunes peintres arrêtés alors qu’ils manifestaient contre les massacres à répétition à Beni et au Kasaï respectivement au nord et au centre du pays, s’est lancé dans une diatrique qui est devenue vitale sur les réseaux sociaux.

Menottes à la main gauche, lié avec un autre artiste également arrêté, Benoït Mugabe se lance alors dans une véritable diatribe contre les autorités. « Vous tous là-bas, regardez le Congo, ce pays de Lumumba, regardez ce pays, regardez le droit. Regardez ce qu’on fait à ceux qui parlent, regardez les menottes« , lance-t-il devant des policiers hébétés.

Ce lundi, c’est au tour de l’Union pour la Nation Congolaise (UNC) de hausser le ton. Le parti de Vital Kamerhe s’est joint à la CENCO, appelant également la population à la mobilisation. «La direction politique de l’UNC approuve totalement la déclaration de la CENCO selon laquelle le pays va mal et adhère à son mot d’ordre : debout Congolais»,  affirme le communiqué de l’UNC.

Etrangement, le pouvoir reste muet à ces appels. La Majorité Présidentielle a, pour sa part, dénoncé les Catholiques, alors que le président Joseph Kabila a, depuis l’Afrique du Sud où il était en visite officielle dimanche, peint un tableau plutôt satisfaisant de la situation du pays.

Le pays, qui a terminé l’année dernière dans situation tendue, avec des morts dans la capitale, Kinshasa, risque de revivre la même situation cette année, où les élections sont de plus en plus inespérées. La situation économique, qui se dégrade davantage, ne fait que renforcer un peu plus la colère populaire.