Quel avenir pour Jean-Pierre Bemba?

Jean-Pierre Bemba a été condamné mercredi  dernier par la Cour pénale internationale (CPI) à un an d’emprisonnement et 300 000 euros d’amende pour subornation de témoins. Avec cette seconde condamnation, le séjour du leader du MLC en prison est désormais porté à 19 ans.

« Igwe », tel était son surnom durant les élections de 2006. Jean-Pierre Bemba était en ce moment-là à deux doigts de devenir président de la République démocratique du Congo. Depuis, les choses ont changé. L’homme jadis adulé tombe petit à petit dans les oubliettes, depuis son arrestation et incarcération en 2008 à la prison de la Haye (au Pays-Bas), où il est désormais condamné.  Il devrait y passé 19 ans de prison, sauf si l’appel effectué par ses avocats changeait quelque chose.

Jean-Pierre Bemba durant ses années de rebellion

Pendant ce temps, à Kinshasa la capitale, loin des pourparlers qui dominent la crise politique actuelle, des gens s’organisent pour « le faire libérer ».  « BembaBack », c’est le nom d’une campagne initiée par son frère cadet, Andy Bemba Batindi. Ce membre du parti politique Peuple au Service de la Nation (PSN) et fondateur de l’organisation humanitaire DRC-Help basée aux États-Unis, lance, selon lui,  un lobbying auprès du congrès Américain pour obtenir la libération de son frère. « Ce lobbying aura pour soutien de base la dynamique #BembaBack, qui sera bientôt lancée par cet homme politique et humanitaire. »

Dans une interview qu’il a accordée lundi à Direct.cd, le frère de Jean-Pierre Bemba y croit dure, expliquant « stratégies et voies pour « ramener Bemba à la maison. » Cette campagne aura pour base de revendication, l’appel interjeté par la défense de Jean-Pierre Bemba en vue de permettre la réduction de sa peine voire sa relaxation. Andy Bemba Batindi indique que des manifestations seront organisées par la dynamique BembaBack en RDC et dans toute la diaspora Congolaise pour que les juges de la CPI prennent en compte les intentions de citoyens Congolais lors de la prise de la décision en réponse à l’appel introduit par la défense.

Andy Bemba, le frère de Jean-Pierre Bemba

« La dynamique #BembaBack jouera le rôle d’une pression sur terrain en termes de manifestations pacifiques à Kinshasa et dans toutes les autres provinces, y compris la diaspora de tous les pays du monde où se trouvent éparpillés les citoyens Congolais pour demander à la CPI d’accéder à la demande du lobbying et à l’appel de juges. Nous devons faire entendre nos voix car garder silence face à l’injustice serait une trahison de notre propre conscience« , explique-t-il.

Selon lui, après la mort de Tshisekedi, Jean-Pierre Bemba reste l’alternative pour une en alternance en RDC face à l’opposition divisée: « Il est temps que Jean-Pierre Bemba revienne sur la scène politique congolaise surtout en cette période de crise. Le Sphinx est parti, l’opposition congolaise a démontré sa faible capacité de mobilisation populaire et aujourd’hui seul Jean-Pierre Bemba apparaît en bonne posture pour incarner la tâche du vrai leader de l’opposition par son autorité et son charisme politique. Tout congolais peut le témoigner. Jean-Pierre Bemba a été condamné certes, mais il y a eu appel de la part de ses avocats, nous espérons que la Cour reviendra sur sa décision et pourra relaxer le sénateur Jean-Pierre Bemba, vu également le nombre d’années de détention qu’il a passé en prison. »

Pour savoir si une telle démarche peut aboutir à la libération de Jean-Pierre Bemba, Politico.cd a approché la Cour Pénale Internationale, à travers son bureau de représentation à Kinshasa. Margot Tedesco, chargée de sensibilisation de terrain au bureau de la CPI à Kinshasa indique qu’après avoir purgé un quart de sa peine, les juges de la Cour Pénale Internationale examine certains critères pour apprécier une décision sur la détention ou la libération d’un prisonnier. M. Tedesco avance pour exemple la libération de Germain Katanga, qui a bénéficié d’une réduction de peine. « Dans tous ces cas il faut savoir que les juges de la CPI sont indépendants. Ils prennent des décisions sans tenir compte des humeurs ou sous quelle pression, peu importe sa provenance » fixe-t-elle.

En effet, arrêté depuis le  25 mai 2008 dans une banlieue de Bruxelles (Belgique), Jean-Pierre Bemba a déjà purgé près de 9 ans à la prison de la CPI, soit près de la moitié de sa peine actuelle.

Interview avec  Margot Tedesco, du bureau de la CPI à Kinshasa au sujet d’une probable libération

Politico.cd: Dans ce cas quels sont les critères pour un prisonnier de bénéficier des mesures d’atténuation des ses peines, est-ce possible pour le cas Jean- Pierre Bemba?

Margot Tedesco. : Le Statut de Rome stipule que lorsqu’une personne a purgé les deux tiers de sa peine, la peine est réexaminée. Les juges décident alors s’il y a lieu ou non de réduire la peine. Pour prendre leur décision, les juges analysent un certain nombre de critères détaillés dans les textes juridiques de la Cour. Parmi ces critères, on trouve par exemple, le comportement au Centre de détention, la situation personnelle, la collaboration continue de la Cour et les remords pour les crimes commis.

A ce jour, les juges ont été amenés à réexaminer la peine dans deux affaires : l’affaire T. Lubanga et l’affaire G. Katanga. Dans la première, les juges ont décidé que la peine ne serait pas réduite, alors que dans l’affaire G. Katanga, les juges ont estimé que G. Katanga remplissait les critères pour bénéficier d’une réduction de peine.

Jean-Pierre Bemba n’a pas encore purgé les deux tiers de sa peine. Il faudra donc attendre qu’il purge les deux tiers de sa peine pour que celle- ci soit réexaminée.

Par ailleurs, il est important de souligner que Jean-Pierre Bemba a fait appel de la sentence et de la peine pour les crimes commis en Centrafrique.

Politico.cd : La défense de Bemba avait annoncé avoir introduit un recours contre sa condamnation dans le premier dossier, où en est- on avec la procédure ?

Margot Tedesco: Dans l’affaire concernant les crimes en Centrafrique, la Défense de Bemba a fait appel du verdict et de la sentence. Maintenant il faut attendre que les cinq juges de la Chambre d’appel se prononcent. La date du prononcé n’est pas encore connue.

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