Titanic, leçon oubliée des politiciens congolais

[TRIBUNE]

Les constructeurs du paquebot Titanic avaient estimé que ce paquebot était fiable, insubmersible. Mais, ils avaient été confondus en avril 1912 par le naufrage de leur bateau.
Il en est de même des politiciens congolais qui s’estiment éternels lorsqu’ils sont à leur apogée. Constamment, ils finissent leur parcours terrestre de façon piteuse, regrettable.

La vie des politiciens de la République démocratique du Congo (RDC) corrobore bien et s’apparente à l’histoire du Titanic, un paquebot transatlantique britannique de la White Star Line, construit à l’initiative de Bruce Ismay en 1907, et conçu par l’architecte Thomas Andrews des chantiers navals de Harland & Wolff.

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Le naufrage du Titanic avait mis fin à sa traversée inaugurale qui devait relier Southampton à New York. Il se déroula dans la nuit du 14 au 15 avril 1912 dans l’océan Atlantique Nord, au large de Terre-Neuve.
Le navire heurta un iceberg sur tribord un dimanche à 23 h 40 et coule en moins de trois heures. Les médias de l’époque lui donnèrent ainsi une image de navire fiable, insubmersible.

Voilà une bonne image qui ressemble au parcours peu élogieux des politiciens congolais, mais aussi une leçon pédagogique pour tout homme qui se croit insubmersible (éternel).
Car, seul Dieu est éternel, les hommes eux, peuvent submerger à tout moment.

Une deuxième leçon qui doit inspirer, est celle du Coronavirus. Cette pandémie a mis fin à l’arrogance humaine et à la puissance des Nations.
Les États-Unis d’Amérique, la Chine, la Russie, la Corée du Nord, la Corée du Sud, l’Allemagne, la France, toutes ces nations sont mises à genoux par un virus. L’orgueil de l’homme est mis à rude épreuve.

Titanic congolais

Revenons à l’insubmersible Titanic pour le contextualiser au parcours des hommes politiques de la RDC.
Tout commence avec Patrice Emery Lumumba. Cette figure de proue qui avait un courage exceptionnel, celui-là même qui avait balancé des tomates pourries au visage des Belges, n’avait jamais cru finir sa vie en prison, puis dans l’acide, loin de la capitale où il avait fait parler de lui.
Lumumba, durant son apogée, n’avait jamais imaginé être en train de fuir à l’instar des petits voleurs des poules. Et la suite est connue.

Le Maréchal Mobutu Sese Seko a régné sans partage durant 32 ans. Il a été divinisé, à tel point qu’il a oublié qu’il pouvait couler un jour. Il avait la possibilité de rendre son peuple le plus riche d’Afrique pour ainsi bien terminer sa course terrestre avec honneur. Pourtant ! Mobutu s’est transformé en tueur de ses frères, ce qui lui a valu une mort ignominieuse loin de sa terre natale. Tous ses proches, ou presque, l’ont abandonné. Celui qui refusait d’être appelé ex-président a été enterré hors pays qu’il considérait comme sa parcelle. Il est inhumé par une quinzaine de personnes, comme quelqu’un mort du Coronavirus.

Chaque Congolais connaît le comportement des fils de Mobutu dans ce pays. Et tous connaissent leur sort, souvent tragique.
Durant le règne de Mobutu, des généraux et hauts dignitaires se sont comportés en potentats, en véritables tortionnaires. Plusieurs d’entre eux sont enterrés en dehors du pays, d’autres inhumés comme de simples vendeurs ambulants des plantes médicinales.

L’ère kabiliste

Laurent Désiré Kabila est venu avec des armes. Ses victoires étaient facilitées par le combat mené sur terrain par l’Union pour la démocratie et le progrès social (Udps).
En dehors de son esprit nationaliste, M’zee a ignoré les opposants trouvés sur terrain. Il a rejeté leur proposition de demander la facture aux soldats étrangers qui l’ont porté au pouvoir.
Il procéda lui aussi aux arrestations et relégations. Et le peuple déchanta. La suite est connue. Certains de ses proches galèrent actuellement, méconnaissables. Pourtant!

Prématuré de continuer à énumérer la liste. Le revirement après l’alternance pacifique et démocratique intervenue a laissé des stigmates.
Si certains félicitent Joseph Kabila d’avoir évité le bain de sang en renonçant au pouvoir, d’autres par contre l’accusent d’avoir détruit le pays en complicité avec ses collaborateurs. Parmi les frustrés du régime passé, se trouve le président du mouvement « Éveil patriotique », pasteur Pascal Mukuna, qui dit détenir déjà plus de 80% des preuves accablantes de détournements, de corruption, des biens et comptes dans les paradis fiscaux des dirigeants du régime précédent. Pascal Mukuna affirme avoir collaboré avec la CPI et les Américains pour d’imminentes arrestations de plusieurs personnalités du Front commun pour le Congo (FCC).
La suite risque d’être aussi ignominieuse comme pour respecter la règle des politiciens congolais qui ont oublié la leçon du paquebot Titanic.

L’omniprésent directeur du Chef de l’État semble se retrouver aussi dans le pétrin. Même si son sort n’est pas d’avance connu, Vital Kamerhe est coffré à Makala,
nonobstant son rang, sa réputation, son ars dicendi (l’art de convaincre, de bien dire).
Il est accusé de détournement de fonds destinés au programme d’urgence de 100 jours du président Félix Tshisekedi.
Les images de ses neveux circulent sur les réseaux sociaux, exhibant des millions de dollars. Authentique ou montage ? Très précoce d’y répondre pour l’instant.
Est-il que certains membres de sa famille sont invités ou recherchés par la justice.
Ce qui est évident, ce dossier est une tâche d’huile pour le président de l’Union pour la nation congolaise (UNC).

Mieux faire en son temps

La liste n’est pas exhaustive. Parce que nous parlons du Titanic, ce paquebot ne disposait pas de canots de sauvetage en nombre suffisant, et l’équipage n’avait jamais été entraîné à gérer ce type d’événement. Le comportement du commandant Edward Smith avait aussi été dénoncé, notamment parce qu’il avait maintenu le paquebot à une vitesse trop élevée compte tenu des conditions de navigation. Exactement avec les politiciens congolais. Pendant leur temps de gloire, ils volent, pillent, tuent, marginalisent et clochardisent la population. Pourtant, « le peuple d’abord », répétait le feu Tshisekedi, peut leur servir de leitmotiv.
Les dirigeants congolais font du mal au peuple alors qu’ils savent qu’ils n’ont pas de bouées de sauvetage. Ils oublient que le peuple a le dernier mot.

Félix Tshisekedi est encore au début de son mandat présidentiel. La leçon du Titanic doit aussi l’interpeller. C’est maintenant ou jamais qu’il faut contenter la population, le souverain primaire. La RDC a besoin des ex-Chefs d’État en vie et non poursuivis par la justice pour concussion, détournements, fosses communes, etc.
Tout le monde est submersible. Seul Dieu le Créateur est insubmersible. Pas le Titanic, pas les puissants dignitaires politiques ou chefs d’entreprises.
Pour autant que vous êtes à la tête du pays, d’un ministère, d’une entreprise, faites du bien pour le peuple, soyez en accord avec la population. C’est lui le juge naturel.
« Mieux vaut la fin d’une chose que son début », renseigne une maxime.

En ce mois d’avril 2020 où Titanic totalise 108 ans après son naufrage, les Congolais doivent intérioriser cette leçon du paquebot oublié.

Édouard Bajika

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