RDC: Pourquoi l’UDPS veut « à tout prix » aller vers les élections

Le plus ancien et le plus historique des partis d’opposition en République démocratique du Congo tente étrangement seul une mêlée vers des élections pourtant perdues d’avance. 
L'accord autour des funérailles de Tshisekedi signé en avril 2018 fut la base de discussions entre Tshisekedi et Kabila

Le 29 septembre à la place Triomphal, alors que les principaux leaders de l’opposition prenaient tour à tour la parole pour dénoncer les machines à voter imposées par la Commission électorale aux prochains scrutins, Félix Tshisekedi, fils du fondateur historique de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS) prenait son monde à contre-pied, entama ce qui s’avère être aujourd’hui une vraie désolidarisation avec les autres parties.

« Je sais qu’ils ont mis des pièges, ils ont placé la machine à voter, ils ont mis le faux fichier [électoral]. Que ce soit la machine ou le fichier, si nous sommes unis, ils ne nous vaincrons jamais« , a-t-il dit.

Volte-face en douceur

Des jours plus tard, Jean-Marc Kubund, un homme qui juré d’abandonner la politique si Kabila était toujours au pouvoir en janvier 2018, annonce la grande nouvelle. L’UDPS, dit-il, est prête à aller aux élections « avec ou sans la machine ». Le terme « sans » n’est en réalité qu’un euphémisme. Le principal parti de l’opposition a déjà pris position pour ces élections.

Pour autant, les revendications défendues jadis par tous étaient légitimes. L’année dernière, des enregistrements d’Aubin Minaku, Secrétaire général de la majorité au pouvoir, se facilitant de leur usage au profit du pouvoir ont été diffusés par la presse.  Par ailleurs, outre l’opposition, l’Eglise catholique et les organisations de la société civile dénoncent également ces machines.

Le Comité Laïc de coordination, une structure catholique, affirme que ces machines risquent de plonger « inutilement » le pays dans un cycle de Violences. » « Le CLC attire l’attention des partenaires sur le fait que le manque de confiance des électeurs dans l’institution organisatrice demeure un sujet plus que préoccupant« , dit-il dans un communiqué publié le week-end dernier, et qui « exige une solution urgente« , appelant la CENI à « retirer immédiatement son projet de machine à voter. »

Cependant, à moins de deux mois des élections, il est peu sûr que la CENI retire ces machines. Par ailleurs, alors que tous appelaient à retirer ces outils, aucun parti de l’opposition n’envisage le boycott. Pire, d’autres prennent part à des législatives avec les mêmes machines, tout en dénonçant la nouvelle position de l’UDPS; donnant de l’eau au moulin du parti de Félix Tshisekedi.

Toutefois, l’UDPS ne va pas innocemment vers ces élections. Avec les disqualifications de Jean-Pierre Bemba et Moïse Katumbi, Félix Tshisekedi qui aurait pu se retrouver dans l’ombre de ces deux leaders, veut en profiter pour se poser en principal challenger de Kabila, même en cas de défaite à cette Présidentielle.

Au début de l’année déjà, le Fils Tshisekedi était en discussion avec Kabila pour un gouvernement de large union. Félix Tshisekedi avait conditionné cet accord à la tenue des funérailles de son père, dont la dépouille est emprisonnée dans une morgue à Bruxelles depuis 2017.  Un accord a été signé en avril 2018 autour de ces funérailles, mais « le temps n’a pas permis la mise en place de l’accord« , renseignait notamment un négociateur du pouvoir autour de ce dossier.

Premier ministre après les élections

Le mois dernier, une source au ministre de l’Intérieur  a fait savoir à POLITICO.CD que Jean Mbuyu, Conseiller spécial du président Kabila, avait reçu des instructions du président congolais pour réactiver le dossier des funérailles. A l’heure actuelle, les travaux du mausolée qui devrait être érigé dans l’Est de Kinshasa stagnent, dans l’attente d’un décaissement. Henri Mova, vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur, chargé de l’affaire, aurait en effet reçu les fonds nécessaires.

Félix Tshisekedi était proposé à l’issue de l’accord du 31 décembre 2016 au poste de Premier ministre avant que Kabila ne décide de nommer un autre dissident de l’UDPS, Bruno Tshibala. Cependant, si le fils de Tshisekedi avait l’accord de ses partenaires de l’opposition, notamment un farouche soutien du côté de Moïse Katumbi, il en est plus question aujourd’hui.  De ce fait, prendre part à des élections perdues d’avance au profit du candidat du pouvoir, Emmanuel Shadary, permettrait à Félix Tshisekedi d’en revendiquer la victoire, pour finir par revenir sur un probable accord avec Kabila autour de la Primature.

Par ailleurs, le changement de position de l’UDPS intervient alors que Félix Tshisekedi  s’est rendu en Ouganda au début du mois sur demande de Yoweri Museveni, longtemps allié du président Kabila. La semaine dernière, Museveni a, à son tour, dépêché un émissaire pour déposer « un message spécial » à Kabila à Kinshasa.

Ce vendredi, alors que l’opposition a mobilisé à travers le pays pour réclamer notamment le retrait des machines et surtout un processus transparent, l’UDPS a séché ce rendez-vous. Félix Tshisekedi qui est arrivé à Paris hier, n’a même pas pris part d’une réunion de deux jours en Afrique du Sud où les opposants annoncent avoir signé un accord de coalition électorale. .

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