Entrée des troupes ougandaises sur le sol congolais : « un cinglant aveu d’échec de l’état de siège » (Prof Bily Bolakonga)

Des voix s’élèvent dans la classe politique congolaise ainsi que dans la société civile après « l’autorisation » que le président Félix Tshisekedi aurait accordée à l’armée ougandaise de pénétrer les frontières congolaises dans l’optique de mener des offensives conjointes contre les rebelles d’Allied Democratic Force (ADF), originaires de l’Ouganda. Ce mouvement terroriste est présenté, depuis 2014, comme auteur d’un massacre des milliers de civils dans l’Est du pays. Certaines de leurs attaques sont notamment revendiquées par l’état islamique.

En réaction, le Professeur Bily Bolakonga, recteur de l’Université Mariste du Congo à Kisangani et analyste politique indépendant, ne va pas en courbette pour qualifier cette décision d’un « cinglant aveu d’échec » de l’état de siège. Pour lui, les nouvelles qui pullulent de deux provinces (Nord-Kivu et Ituri) le certifient.

« En choisissant d’admettre l’entrée des troupes ougandaises en RDC, le chef de l’État a opté pour le moindre mal, dans la mesure où une invasion de l’armée ougandaise sans l’accord de la RDC serait une humiliation qui s’apparenterait aux fourches caudines, tant la RDC n’a nullement le moyen, pour le moment, de contenir une invasion ougandaise », rétorque-t-il , qualifiant la décision qu’aurait prise par Tshisekedi « sans médiatisation » d’un cinglant aveu d’échec de l’état de siège.

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Car, explique ce Professeur des Universités et acteur de la société civile, « la crème jouit pendant que les simples soldats triment sur les champs de bataille. » Et de poursuivre : « les populations continuent à se faire massacrer au quotidien par dizaines au moins ».

Dans la foulé, Bily Bolakonga qui se dit « sceptique » quant à l’acceptation par le président Félix Tshisekedi de l’entrée de l’armée ougandaise, pense qu’il valait mieux de coopérer mais, regrette-t-il, que les troupes congolaises sont gangrenées par « l’affairisme » et manquent cruellement des moyens opérationnels. Ainsi, poursuit-il, la décision , si elle serait déjà prise, il convient de l’encadrer car, dit-il, l’essentiel est, à la fin des comptes, le retour de la paix. Il l’explique à trois points notamment :

Primo : il faut donner à cette décision l’étoffe de la légalité en recourant à tous les instruments juridiques y afférent (parlement et autres);

Secundo : il faut encadrer cette entrée via un accord comportant des clauses clairs impliquant les commandements de deux armées (création d’une Commission militaire conjointe opérationnelle), éviter que l’armée ougandaise – réputée à l’Est de la RDC pour son faible niveau de discipline et l’affairisme de certains de ses généraux – ne verse dans l’exploitation des ressources naturelles et humaines, créer des mécanismes opérationnels et de contrôle conjoint à intervalle de temps régulier, prévoir de manière claire des mécanismes de sanction pour tout auteur de dérapage ou de crime qui qu’il soit…

Tertio : limiter dans le temps la présence de cette armée étrangère et veiller à ce que l’évaluation après échéance (avec possibilité de rallonge) soit basée sur les résultats et le respect scrupuleux des clauses de l’accord.

Notons que dans un briefing de presse sur l’État de Siège tenu lundi 29 novembre, le porte-parole du gouvernement, a éclairé la lanterne qu’il n’y a pas des troupes ougandaises sur le sol congolais. Patrick Muyaya a rassuré qu’il y a plutôt des contacts réguliers et étroits entre les deux forces armées.

Serge Sindani

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