Dossier 100 jours: Kamerhe, Bamaros du FONER et Makabuza de SOCOC: le trio d’un autre scandale judiciaire

Lundi 13 avril 2020, les éléments de la Police nationale congolaise ont mis la main sur Modeste Makabuza, DG de la société SOCOC. Il est transféré à la prison de Munzenze à Goma, en attendant son transfèrement à Kinshasa.

Le mandat d’arrêt fait mention du détournement de fonds publics alloués aux travaux d’asphaltage des routes au Nord-Kivu, au Sud-Kivu et au Kasaï.

Le DG de SOCOC avait, avant cette journée, mené une campagne de com en faisant visiter, par les journalistes et autres professionnels des médias, les travaux de construction et de modernisation de plusieurs routes.

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Il a affirmé que ces travaux s’inscrivent dans le cadre du programme de 100 jours du président de la République démocratique du Congo pour lesquels la SOCOC a signé un contrat avec le gouvernement central par l’entremise de l’OVD qui est le maître d’ouvrage délégué, pour exécuter ces travaux.

« C’est dans le programme de 100 jours que la SOCOC avait décroché le marché d’exécution de 12,522 km à Goma et 20 Km à Bukavu », précise l’ingénieur Jacques Amani , directeur technique de SOCOC.

L’arrestation de Modet Makabuza intervient après celle de Fulgence Bamaros, Directeur général du Fonds National d’Entretien Routier (FONER) à Kinshasa.

Ce responsable du Fonds congolais aurait payé plusieurs millions de dollars à la société SOCOC pour la construction des routes qui n’ont pas été réalisées.

Que reproche-t-on au Directeur général de SOCOC?

Contrairement à ce que la Société SOCOC a raconté lors de son action de communication, le réseau routier de la ville de Goma n’a pas été financé par les animateurs de SOCOC.

Il a été financé à 60% par l’Union Européenne-Banque Mondiale (32 KM), par le FONER pour 27% (14 KM) et par les pétroliers pour 13% (7 KM).

La contribution des pétroliers est constituée de la retenue sur chaque mètre cube de carburant importé d’un montant autorisé par le gouvernement orovincial.

Sur instruction et insistance du Directeur de cabinet, Vital Kamerhe, l’Office des Voiries et Drainage (OVD) a signé un contrat avec le FONER pour la construction de 10 Km de routes dans la ville de Goma et 20 Km dans la ville de Bukavu.

Jusqu’ici, il n’y a rien de louche, mais le bas blesse lorsque l’OVD confie la charge à une récente entreprise, la SOCOC (Société de Construction du Congo) pour exécuter ces travaux.

Ce contrat, portant sur une somme de USD 66 millions, ne concerne pas les villes de Mbuji-Mayi et de Kananga qui ont pourtant été évoquées auparavant pour arracher cet accord.

Le but était de faire valider au Chef de l’État cette supercherie pour lui arracher l’accord verbal.

Au coût de USD 66 millions pour 30 KM (10 Km à Goma et 20 Km à Bukavu ), le prix moyen par Km est de USD 2 millions 200 mille, alors que le coût moyen pour la construction de 1 Km est évalué à USD 1 million en zone urbaine.

Ce qui est plus grave, la ville de Goma, ayant un sol volcanique et pierreux, demandera moins de matériaux et travaux que les autres routes.

Ce qui fait que le prix de construction d’une route y sera plus faible.

Ce coût de USD 2 millions 200 mille le kilomètre s’avère donc totalement absurde.

Pour cette opération, la Banque TMB est sérieusement intervenue. Elle a procédé au financement de la totalité du montant (USD 66 millions) qui sera remboursé par le FONER durant 27 mois consécutifs, à raison de USD 2 millions 500 mille par mois représentés dans les traites bancaires.

Le premier paiement a eu lieu le 25 août 2019, les autres suivront chaque le 25 durant 27 mois.

Dans un premier temps, le FONER a signé 12 retraits bancaires pour un total de USD 30 millions.

Or, des informations en notre possession font état d’un document signé par le Directeur de cabinet du Chef de l’État, Vital Kamerhe, le 18 juin 2019, en réponse à une demande d’accompagnement de financement d’un projet économique sollicité par M. Mukuangu Nkombo Doudou, gérant de l’entreprise Zawal non autrement identifiés ayant son siège sur Mondjiba, dans la commune de Ngaliema, à Kinshasa.

Dans un document exclusif parvenu à Politico.cd, Vital Kamerhe, au nom du Chef de l’État, instruit le FONER d’allouer, mensuellement et pendant 12 mois la somme de USD 2 millions, mensuellement, et pendant une période de 12 mois à Mukuangu Nkombo pour la construction des dépôts et stations-services de carburant à Mbuji-Mayi, Kananga et à Mwene-Ditu, soit un montant total de USD 24 millions.

Or, il s’avère que ces fonds décaissés par la FONER sont logés directement dans les caisses de la SOCOC, dont le DG Makabuza est un proche du Directeur de cabinet du Chef de l’État, Vital Kamerhe.

Se sentant menacé au vu des arrestations de Fulgence Bamaros et de Vital Kamerhe, la SOCOC a fait croire aux gens que les chantiers en cours font partie du programme de 100 jours du Chef de l’État alors que la seule route concernée dans ce programme est celle de Goma-Walikale.

Les interrogatoires de Vital Kamerhe, du DG de l’OVD et celui du FONDR ont amené le Parquet général près la Cour d’Appel du Nord-Kivu d’émettre un mandat d’arrêt contre Modet Makabuza pour détournement des fonds alloués au programme d’urgence de 100 jours du Chef de l’État, Félix Tshisekedi.

Ces arrestations constituent une étape importante dans dans la lutte contre la corruption

Ces arrestations en cascade n’ont pas laissé indifférent Ida Sawyer de Human Right Watch pour qui elle constitue des étapes importantes dans la lutte contre la corruption

« Les arrestations du chef de cabinet du président Tshisekedi, Vital Kamerhe, du directeur du Fonds routier national, Fulgence Lobota, et de l’homme d’affaires Modeste Makabuza pour allégations de détournement de fonds publics pourraient constituer des étapes importantes dans la lutte contre la corruption, » a déclaré le numéro un de cette ONG internationale de défense de droit l’homme.

Elle souhaite que la justice soit indépendante et que les droits des accusés soient respectés.

« Le détournement de fonds publics dans DRC devrait être puni et les responsables devraient être tenus responsables. Mais, il est crucial que le pouvoir judiciaire puisse agir de manière indépendante, que les droits des accusés soient respectés et qu’ils bénéficient tous de procès équitables et crédibles, » a-t-elle recommandé.

Ida Sawyer souhaite, par ailleurs, que d’autres personnes impliquées dans une corruption à grande échelle en RD Congo fassent l’objet d’une enquête et de poursuites, indépendamment de leur appartenance politique et de leur loyauté.

Thierry Mfundu

3 comments
  1. Je suis satisfait du service rendu,et du professionnalisme avec lequel vous traitez l’information je vous demande de faire mieux encore. Merci de nous informer en continu

  2. Savez vous qu un financement d’ une banque se repaie avec des taux d’intérêt . Vs indiquez des chiffres qui prouvent que vs ne les prenez mm pas en compte . A vouloir donner trop d info en faisant du forcing médiatique, vous tuez l’information

  3. Étudiant a l’ulpgl-Goma, pour nous les gomatraciens C’est une bonne chose. Nous sommes surpris de voir les enfants (patrons) de la ville volent leur entité. D’ailleurs c’est sont eux qui devraient nous aider pour faire la beauté de notre ville mais eux décident d’utiliser cet argent pour leur besoin. Nous prions a l’Etat qu’il surveille très bien les choses, c’est-à-dire que c’est pas pour la première fois mais c’est l’habitude… Merci

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