CENI: Une vaste campagne de gonflement du fichier électoral démontée

La CENI s’apprête à rendre public son rapport d’audit du fichier électoral à l’issue des enrôlements  opérés l’année dernière sur toute l’étendue du pays. Et alors que ce fichier, initialement de plus de 46 millions d’électeurs, est l’objet de toutes les attentions en RDC, avec des suspicions de fraude, Corneille Nangaa, président de la commission électorale,  devrait déballer un résultat sans appel.

Le groupe lituanien NeuroTechnology BTC, dont le contrat n’a pas été rendu certes public, a effectivement audité ce fichier électoral. Et, d’après des résultats, cela valait la peine : autour de 5 à 6 millions de doublons ont été identifiés, avec pas moins d’un millions de mineurs. Au total, le rapport de la CENI annonce 40.590.000 électeurs inscrits sur le fichier électoral nettoyé après validation résultats de la détection doublons.

Derrière le grand déballage que s’apprête à faire Corneille Nangaa, il y a des véritables tentatives de biaiser le fichier électoral, notamment par des « hommes politiques » en provinces. Ainsi, à titre d’exemple, le Sankuru regorge à lui seul pas moins de 800.000 doublons. « La Tshuapa n’est pas loin », affirme une source à la CENI, qui confirme que les deux provinces caracolent en tête.

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Gonflement systématique

Selon la CENI, le Sankuru a produit pas moins de 2,2 millions d’enrôlés à l’issue des opérations qui ont pris fin en octobre dernier. Etrangement, cette province n’avait que 453.599 en 2006 et autour de 626.141 en 2011. En août dernier déjà, le député de l’opposition Martin Fayulu était monté au créneau pour dénoncer cette situation.  « La CENI doit nous expliquer la progression  du nombre d’électeurs au Sankuru. 2006: 453.599; 2011: 626.141; 2017:1.726.282« , avait-il lancé son compte Twitter.

Avec 4 Sénateurs, Sankuru est depuis 2015 une province de la RDC, à la suite de l’éclatement de la province historique du Kasaï-Oriental. Sa population est estimée à 1,07 millions d’habitants en 2006, mais la province n’a jamais connu de recensement depuis.

La Tshuapa voisine n’est pas épargnée par ce phénomène. Des sources à la CENI affirment que les deux provinces étaient soupçonnées dès le départ. Des hommes politiques auraient organisé le gonflement pour obtenir plus de sièges aux législatives.

En effet, alors que la nouvelle loi électorale a fixé un seuil de représentativité susceptible d’éliminer beaucoup de partis politiques aux législatives, beaucoup auraient alors misé sur ce « gonflement systématique » pour ainsi augmenter le nombre de sièges dans leurs provinces, augmentant ainsi leurs chances d’élections.

Par ailleurs, le Sankuru est le fief de Lambert Mende, ministre congolais de la Communication et des médias, également cadre de la majorité au pouvoir. Le mois dernier, l’autorité morale de la Convention des Congolais Uni (CCU) a surpris ses camarades de la Majorité Présidentielle (MP) en enregistrant seul son groupement politique pour les prochaines élections auprès du ministère de l’Intérieur.

En aout dernier, Mende expliquait l’incroyable accroissement du nombre d’électeurs dans son fief par le flux de réfugiés qui seraient venus de la région du Kasaï voisine, en proie à des violences. « Nous avions eu grand problème la fois dernière, il y avait eu des incidents, qui ont fait qu’on avait bloqué l’enrôlement pendant, je crois, trois semaines. Et on a pas prolongé, ce qui fait que pratiquement la moitié des électeurs n’avait pas été enrôlée« , a dit Lambert Mende le 29 août 2017 sur POLITICO.CD.

« Nous avions même eu des sérieux contentieux avec l’ancien président de la CENI, Monsieur Ngoy Mulumba, parce qu’il avait refusé de prolonger l’enrôlement, c’est connu. Fayulu n’est pas du Sankuru, je pense qu’il ignore tout ceci« , répondait-il au député de l’opposition qui a eu finalement de s’inquiéter.

Tshuapa, dont la capitale est Boende, est identifiée comme le fief d’un autre homme fort, l’ancien vice-président de la CENI, Jacques N’Djoli. Sénateur de l’opposition, il est cependant l’architecte du fichier électoral des élections chaotiques de 2011, et reste à ce jour un expert en matière électorale.

Plusieurs personnalités sur les réseaux sociaux ont appelé le Procureur général de la République à se saisir de cette situation. « Le Procureur Général doit s’en saisir ! Identifier les auteurs, les coupables à condamner avant le dépôts des candidatures, écarter coupables! » S’insurge l’ancien gouverneur de la Province Orientale et député national Jean Bamanisa Saidi.

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