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Maman Sidikou: un mandat fiasco, un départ sur la pointe des pieds

Ancien représentant spécial de l’UA pour la Somalie (SRCC) et Chef de la Mission de l’UA en Somalie (AMISOM), Maman Sidikou a été parachuté à la tête de la Monusco en octobre 2015, dans un contexte politiquement tendu qui lui sera finalement fatal.

En effet, si l’américain William Lacy Swing reste dans la mémoire des Congolais comme celui ayant marqué la mission, notamment avec la célèbre chanson « Koko Swing », il n’est sera pas le cas pour Maman Sidikou, dépassé même de loin par l’allemand Martin Kobler que l’on pouvait voir débout, point levé au milieu des Forces armées congolaises dans l’Est.

Maman lui, est devenu célèbre à l’opposée, grâce à une photo le figeant, faisant une courbette à Joseph Kabila, président congolais de plus en plus contesté, comme l’engagement même de l’ONU qui s’éternise depuis 20 ans dans ce pays tourmenté.

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Maman Sidikou: à la Monusco, on plaide l’incompréhension

Le moment fort de la saison du désamour entre le Chef de la MONUSCO et la population congolaise commence le 9 avril, deux jours après la nomination sur ordonnance présidentielle de l’opposant Bruno Tshibala — contestée par une frange de l’opposition —  au poste de Premier ministre.  Dans un communiqué, Maman Sidikou dit « prendre acte » de cette nomination par le président Joseph Kabila tout en notant aussi « la réaction du Rassemblement à la décision du Président de la République, telle qu’exprimée dans son communiqué du 9 avril 2017. »

La sortie « diplomatique » du Représentant spécial du Secrétaire général des Nations-Unies au pays rencontre l’assentiment de tous les camps, puisque aucune protestation n’aura lieu. Du côté du Rassemblement même, on songe déjà à prendre part à une offre de bons offices que la coalition dirigée par Félix Tshisekedi avait préalablement demandé.

Deux mains gauches

Cependant, la donne change le samedi 15 avril. A l’issue d’une visite chez Bruno Tshibala à Kinshasa, Maman Sidikou indique qu’il n’a jamais été question dans le communiqué de son institution de remettre en cause la nomination de Bruno Tshibala. Après avoir échangé avec le Premier ministre,  Maman Sambo Sidikou indique que le Premier ministre contesté est fortement préoccupé par l’organisation des élections en RDC. Une sortie qui suffit à elle seule pour déclencher une véritable levée de boucliers du côté du Rassemblement aile Félix Tshiskeedi. Dans un communiqué publié dans la foulée, Pierre Lumbi fustige le haut fonctionnaire onusien.

Session de rattrapage, Maman Sidikou recevra les représentants de l’opposition pour calmer le jeu. Néanmoins le mal était fait. Et, à présent, le désamour risque d’aboutir à un divorce. Dans un autre communiqué, cette fois du mouvement citoyen Lutte pour le Changement (Lucha), on appelle carrément au départ de l’officiel onusien.

Qualifiant la mission de l’ONU « d’inefficace », un refrain déjà entendu au sein même de l’institution internationale, la LUCHA a pris le soin de recenser tous les foyers de tensions à travers le pays, pour ainsi appuyer sa sortie. «La force de la Monusco est devenue force inutile dans sa manière de remplir sa mission, celle de protéger les civils et de stabiliser la paix en RDC, quant à sa responsabilité lui conférée au conseil de Nations-unies », fustige ce communiqué.

Des soldats tanzaniens de la MONUSCO accusés d’abus sexuels : C’est une honte pour les Nations Unies, selon Maman Sidikou

Et pour corser l’addition, la LUCHA pense que Maman Sidikou « n’est pas à la hauteur des responsabilités lui confiée , son remplacement immédiat par un autre s’avère important. »

Par ailleurs, l’homme doit aussi faire face à des dossiers de viols sur des Congolaises par des agents de cette mission, au point d’être un record mondial au sein de l’ONU. Déjà, des personnels de la MONUC ont été impliqués dans 140 cas d’allégations sur des abus d’exploitation sexuelle entre décembre 2004 et août 2006.  De nouveaux cas ont été rapportés, notamment en 2008 et 2014Des familles des victimes montent alors au créneau pour dénoncer.

Meurtres d’agents de l’ONU à la barbe de la MONUSCO

Les deux experts de l’ONU tués dans le Kasaï

En mars, le monde apprend, hébété, les assassinats de deux experts de l’ONU, Michael Sharp etZaida Catalán. Outre le choc lié à ces assassinats, il y a aussi des doutes concernant l’engament de la mission onusienne sur la protection de ses deux membres en RDC. En effet, dans un éditorial publié le 23 mai, le New York Times est allé jusqu’à accuser l’ONU de complicité dans ces assassinats.

Le vif éditorial intitulé: « The U.N.’s Complicity in a Congo Murder« , à traduire par : « La complicité de l’ONU dans un meurtre au Congo« , et signé par le service des éditoriaux, porte-voix de ce média historique américain, fustige dans des termes très durs les Nations Unies, ainsi que les autorités congolaises tant dans la crise au pays qu’au sujet de Zaida Catalán et son collègue américain Michael Sharp.

Coincée entre politique et la diplomatie, la MONUSCO n’aura jamais capable d’apporter une réponse claire tant sur ces assassinats que sur l’incroyable répression et tuerie perpétrées parfois par des éléments de l’armée congolaises.

Une championne des droits de l’Homme pour lui succéder

Il y a aussi Kinshasa, qui affirme ouvertement sa décision de voir la MONUSCO quitter le pays. Il ne faudra non plus oublier l’inefficacité criante des forces onusiennes dans l’Est du pays, face à des mouvements rebelles qui n’hésitent plus à attaquer ses propres bases, faisant notamment 15 morts en décembre dernier.

Maman Sidikou s’en va et va être remplacé dès février 2018 par l’Algérienne Leila Zerrougui, à la tête de la plus grande mission de maintien de la paix de l’ONU dans le monde, a annoncé le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres le mercredi 27 décembre.Détail clé, alors que Kinshasa est dans le viseur de la Communauté internationale pour sa répression vis-à-vis de l’opposition et des mouvements citoyens, l’ONU a décidé de lui envoyer une spécialiste des droits de l’homme et de la justice.

En effet, Mme Zerrougui, qui a déjà travaillé comme adjointe de la Monusco entre 2008 et 2012, avant d’être nommée représentante spéciale pour les enfants et les conflits armés par le secrétaire général des Nations unies, est une Juriste de formation et très remarquée pour son engagement en faveur des droits de l’Homme.

Elle a été membre du Groupe de travail sur la détention arbitraire au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies depuis 2001, et a été Présidente et Rapporteure du Groupe de travail de 2003 à 2008. Elle avait auparavant servi en tant que membre expert au sein de groupes de travail et de comités de la Commission des droits de l’homme.

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