Réfugiés sud-soudanais en RDC: l’ombre de Rwanda 1994

Il y a deux millions de réfugiés sud-soudannais dont la majorité en RDC, soit le plus grand flux depuis le génocide rwandais en 1994, à la base de conflits meurtrier à l’Est de la République démocratique du Congo.

Selon le Haut Commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR), plus de deux millions de réfugiés du Soudan du Sud ont fui leur pays en 2016 à cause de la guerre civile, pour se réfugier en République démocratique du Congo (RDC) et en Ouganda, soit le plus grand exode en Afrique depuis le génocide de 1994 au Rwanda.

« La cause principale de cet exode de milliers de réfugiés sud-soudanais, c’est bien sûr la guerre civile qui oppose depuis juillet dernier le président du Soudan du Sud Salva Kir à l’ex-vice-président Riek Machar. Un conflit qui aura entraîné le déplacement de plusieurs milliers des civils vers les pays voisins en l’occurrence la République démocratique du Congo et le Soudan« , craint Eric Ngala du HCR, cité par l’agence Xinhua. 

South Sudan's rebel leader Riek Machar sits near his men in a rebel-controlled territory in Jonglei State, South Sudan January 31, 2014. REUTERS/Goran Tomasevic/File Photo
South Sudan’s rebel leader Riek Machar sits near his men in a rebel-controlled territory in Jonglei State, South Sudan January 31, 2014. REUTERS/Goran Tomasevic/File Photo

En effet, le Soudan du Sud est ravagé par une guerre civile depuis décembre 2013, et une nouvelle flambée de violence a éclaté en juillet 2016. L’ex-vice-président sud-soudanais Riek Machar avait fui Juba la capitale, suite à ces combats à l’arme lourde, du 8 au 12 juillet 2016, entre les forces loyales au président Salva Kiir et les ex-rebelles répondant à ses ordres.  Vaincus, Riek Machar et ses hommes armés avaient trouvé refuge en RDC où la mission onusienne, MONUSCO les a pris en charge, les délocalisant vers Goma, dans l’Est de la République démocratique du Congo.

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Depuis, cette présence des rebelles de Riek Machar et celle de nombreux autres réfugiés civiles est dénoncée par des organisations de la Société civile et même des politiciens congolais, craignant une nouvelle flambée de violences dans cette région, victime d’une situation similaire à l’issue du génocide rwandais en 1994. L’afflux de combattants rebelles de pays voisins est en effet un thème sensible dans cette région du pays, où le flux de miliciens hutus du Rwanda a aidé à déclencher des années de conflit régional.

En octobre dernier, le ministre Crispin Atama Tabe, en charge de la Défense et des Anciens combattants en République démocratique du Congo a donné une semaine à la MONUSCO pour faire partir ces combattants sud-soudanais de la RDC. Par ailleurs, des députés nationaux élus du Nord-Kivu et des organisations de la Société civile ont plusieurs fois demandé à la mission onusienne de faire partir ce combattants. Plusieurs marches ont même été organisées à cette occasion.

De plus, la MONUSCO a fait état, la semaine dernière,  des rapports faisant état d’infiltrations d’hommes en armes sur le sol congolais. . Le porte-parole de la Mission onusienne en RDC (Monusco), Félix Prosper Basse, en a parlé lui-aussi sans détour ce mercredi 11 janvier lors de la conférence de presse hebdomadaire de la Mission : « Depuis un certain temps, ça pose problème parce que même au sein des réfugiés, il a été noté la présence de certains éléments armés. Nous avons aussi observé dans la région de Yambio, non seulement une présence assez inquiétante de nouveaux réfugiés, mais aussi de certains éléments armés, ces derniers temps. Les FARDC [Forces armées de RDC] sont sur le terrain. La preuve, ils en ont capturés certains […] pour les neutraliser et mettre un terme à cette menace qui pourrait éventuellement provoquer des conséquences beaucoup plus dramatiques qu’on ne le pense. »

L’ONU et la Belgique s’activent

des-soldats-rebelles-de-l-armee-de-liberation-du-peuple-soudanais-arrivent-a-l-aeroport-de-juba-le-28-mars-2016_5572675Toutefois, le Haut-commissariat aux réfugiés (HCR) a démenti cette information faisant étant d’hommes armés dans des camps de réfugiés. « Il n’y a pas aujourd’hui d’hommes en arme dans les sites de réfugiés choisis de commun accord avec le gouvernement congolais« , a dit un responsable de cette organisation, cité par Radio France International. Ce dernier affirme plus tôt qu’il s’agit d’une débordement, qui a motivé l’éloignement de la frontière de milliers de réfugiés sud-soudanais en novembre 2016.

De son côté, l’ONU s’est engagé à aider à trouver des solutions durables pour les éléments sud-soudanais désarmés. L’Envoyé spécial des Nations Unies pour la région des Grands Lacs, Said Djinnit, et le Représentant spécial du Secrétaire général pour la République démocratique du Congo (RDC), Maman Sidikou, ont entamé le 12 janvier une série de consultations conjointes à Goma et à Kinshasa pour examiner la question de la présence d’éléments sud-soudanais de l’Armée populaire de libération du Soudan dans l’opposition (APLS – O) dans l’est de la RDC.

Les responsables de l’ONU ont rencontré le gouverneur du Nord-Kivu, Julien Paluku, des anciens combattants de l’APLS-O hébergés dans le camp de Munigi, a précisé la Mission des Nations Unies en RDC (MONUSCO) dans un communiqué de presse publié lundi. M. Paluku a exprimé de graves préoccupations quant au risque de déstabilisation accrue de la situation au Nord-Kivu si les éléments de l’APLS-O ne sont pas réinstallés ailleurs le plus tôt possible. Il a demandé le soutien des Nations Unies pour faciliter le transfert de ces éléments sans plus tarder.

M. Djinnit et Sidikou ont réitéré l’engagement des Nations Unies à aider à trouver des solutions concernant la présence de ces éléments, en coopération et en consultation avec les autorités de la RDC et des autres pays de la région, l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) et l’Union africaine.

« L’ONU est déterminée à travailler avec le gouvernement de la RDC, les pays concernés de la région, l’IGAD et l’UA pour trouver des solutions durables pour ces éléments et soutenir la mise en œuvre de l’accord de paix au Soudan du Sud », a déclaré M. Djinnit. « Nous devons faire tout ce qui est possible pour éviter la propagation en RDC de la crise au Soudan du Sud, ce qui aurait un impact grave sur les populations qui vivent dans une région sur laquelle pèsent déjà les activités de nombreux groupes armés illégaux ».

A Kinshasa, les responsables de l’ONU ont rencontré plusieurs responsables gouvernementaux, avec lesquels ils ont convenu de créer un comité technique conjoint chargé d’élaborer des solutions pour la réinstallation des ex-combattants de l’APLS-O. Le comité devrait tenir sa première réunion le 18 janvier 2017.

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«Je me réjouis de la décision du gouvernement de créer un comité technique, conjointement avec la MONUSCO, pour résoudre la question des éléments de l’APLS-O se trouvant sur des sites de la MONUSCO. Je suis persuadé que cela permettra d’approfondir la coopération de la Mission avec le gouvernement», a souligné M. Sidikou.

Lundi, la Coopération belge au Développement soutiendra un programme de deux ans du Haut Commissariat des Nations unies pour les Réfugiés (HCR), a-t-il précisé dans un communiqué.

«Au Soudan du Sud, l’un des pays les plus jeunes au monde, la souffrance humaine est terrible. La responsabilité des leaders politiques sud-soudanais est écrasante. Ils font primer leurs propres intérêts sur la sécurité de leurs 11 millions de concitoyens. Comme les besoins humanitaires sont criants, j’ai décidé de soutenir les autorités congolaises et ougandaises sur le plan humanitaire dans l’accueil des nombreux réfugiés. Espérons qu’après trois ans de guerre, on verra enfin s’esquisser en 2017 une ébauche de paix durable au Soudan du Sud», a déclaré M. De Croo, cité par le communiqué.

Le financement belge de trois millions d’euros servira à alimenter le plan d’urgence du HCR pour les réfugiés sud-soudanais en RDC et en Ouganda, à parts égales.

Avec AFP, RFI, Jeunes Afrique et Partenaires.

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