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Il y a 20 ans, Mobutu aurait pu mourir!

Le dimanche 7 septembre 1997 à 21h30, la légendaire chaîne américaine CNN confirme la nouvelle à travers une brève publiée sur son site internet. Le maréchal Mobutu Sese Seko Kuku Ngbendu Wa Za Banga est décédé depuis son exil son Maroc, créant de l’émoi et des scènes de liesse dans la capitale zaïroise devenue congolaise. Vingt ans après, il s’avère que l’éternel dictateur aurait pu vraiment mourir.

Il est venu au monde pour régner à vie. « Moi ou le chaos » disait-il de son vivant. Et l’homme semble tenir parole, de l’au-délà même. Vingt ans après ce qui aurait dû être la fin de son pouvoir destructeur sur des millions de vies zaïroises, Mobutu Sese Seko, né Joseph-Désiré Mobutu, reste aussi vivant, tant dans l’esprit que dans le quotidien de cette nation en perdition.

Et pourtant, Laurent-Désiré Kabila et ses mauvais alliés de circonstance ont cru avoir tout fait. Une entrée triomphale dans la capitale. On renomme les stades, les lieux, le fleuve, la monnaie et même le pays; tout en s’offrant une épuration du système Mobutu. Et, comme un symbole, la mort du guide suprême à peine quatre mois après la prise du pouvoir par l’Alliance des Forces Démocratiques de Libération du Congo (AFDL).

Hélas! Dès l’aube de son intronisation, le « Mzee » se rendra compte de la situation. Car en réalité, tout pouvoir qui dure plus de trois décennies n’est plus la propriété d’un seul homme. Il devient un système, un état d’esprit, une nation. Dans cette nouvelle République démocratique du Congo naissante, il s’avère que le Maréchal n’ait plutôt été que la partie visible de l’Iceberg. Tout de suite, on se rend compte qu’il faille des spécialistes pour piloter le chaos Congo. Les mêmes qui traversa,  jambes au cou, en direction de Brazzaville, devaient à tout pris revenir. Sans compter sur la querelle autour du partage du gâteau congolais entre anciens alliés, qui pointe son nez et qui se transformera en une effroyable guerre.

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En somme, le départ de Mobutu n’a rien réglé dans ce pays. Le Mobutisme, son système à lui, pensé et créé dans le seul objectif de le garder haut, au pouvoir, se bat alors avec le nouveau, par puissances extérieures interposées. Au milieu, un homme, un vieux maquisard, paiera de sa vie. De ses cuisses, sort un certain Joseph Kabila. Il a 29 ans. Frêle, ne sourit pas. Il rappelle par ailleurs un certain Joseph-Desiré lorgnant par dessus l’épaule de Patrice Emery Lumumba.

Le maréchal est mort, vive le Raîs!

Le jeune homme, comme son feu père assassiné, découvre alors qu’il lui serait très utile d’imiter l’autre Joseph, qui n’aura jamais été mort. Comme Mobutu, Joseph Kabila se fait petit. Il hérite du petit Machiavel édition poche que jadis utilisait le grand maréchal pour guider son Zaïre. Cinq ans après, comme lui, il pacifie le pays. Les anciens mouvements rebelles connaissent alors soit un destin à la Evariste Kimba, soit à la Lambert Mende.

Soudain, comme en 1965, devant l’hôtel Régina à Kinshasa, le Général-Major devient le Raïs, une sorte de « Sese Seko » version Katangaise. Katumba Mwanke meurt dans un crash, à la Bingoto. Le MPR [Mouvement Populaire de la Révolution alias Majorité Présidentielle] voit le jour. Le fils de Mzee ira jusqu’à photocopier les pratiques de l’ancien dictateur. Il duplique la fameuse DSP et la renomme en « Bana Moura ». Il garde la même opposition en état liquide. Il s’offre une interminable transition, fait danser l’Occident, s’effrite à eux et prend même le plaisir de s’offrir un Étienne Tshisekedi version Kabilie: Moïse Katumbi. L’économie est au même niveau: le dollar fait danser la monnaie nationale, les fonctionnaires seront un jour payés.

Mobutu aurait pu mourir. Il est toujours pourtant là, à travers un système qui s’enracine dans l’identité même de cette nation. Le maréchal n’aura finalement été qu’un état d’esprit, un ensemble de pratiques, une boite de Pendore que chacun rouvre pour y tirer toutes sortes de maux serviables. A son peuple chéri, Mobutu aura imprégné la faculté d’oublier, d’oublier très vite, jusqu’à le regretter. Le préférer à celui qui ne fait pourtant que refaire sa conception du machiavélisme. Au fond, c’est peut-être la toque, les lunettes et la canne qui manquent à ce peuple, pour se rendre finalement compte que le Maréchal aurait vraiment pu mourir.

Litsani Choukran,
Le Fondé

12 comments
  1. Les Alex Thambwe Mwamba, Kengo Lobitch, Adolphe Lumanu, Lambert Mende, Kin-Kiey Mulumba, et les Mokolo-wa-Je ne sais quoi, perennisent le Mobutisme

    Voila donc le systeme que le Voyou au Sommet, alias « Mobutu-Light » maintient en place dans l’objectif de se taper aussi 32 ans d’imposture, pourquoi pas une presidence-a-vie a l’aide de ces traitres-opportunistes

  2. Pertinente rétrospective et excellente tentative de prospective tandis que le présent nous est ouvert comme nous l’entrevoyons tous ! Le titre m’a d’abord bluffé puis à la lecture de l’analyse à laquelle il a pleinement donné l’orientation, il m’a plutôt convaincu… Bravo !
    Une question à nous poser à cette occasion : si le Congo de ‘JK’ ressemble à s’y méprendre au Zaïre de Mobutu, bâti sur un pouvoir personnalisé, patrimonialiste et aussi prédateur, cela signifierait-il qu’il n’y aura jamais place pour la « bonne gouvernance », plus de « justice sociale » et moins de « société inégalitaire » dans ce pays ?

    1. Trop de pesenteurs brillament organisées en Occident!. C’est la cause première du non décollage du pays de Lumumba. Un grand Congo en marche, c’est l’Afrique du Sud en développement au sortir de la deuxième guerre mondiale, un pays qui a fini par s’émanciper, arrachant au passage à l’Angleterre tous ses marchés en Zambie, au Zimbabwe, en Tanzanie, au Lesotho, au Botswana et au Zwaziland.

      Un congo en plein envol, c’est la terreur de la France qui perdrait économiquement les pays francophones autour du Grand Congo.

      Il faut savoir cela pour mieux connaître les sources principales des souffrances imposées au pays et mieux monter des stratégies salvatrices.

      Ne cibler que Kabila et laisser Katumbi et Felix se faire sodomiser en Occident et revenir lacher des pets nauséabonds au pays, cela s’appelle: To zo ko Rond-Point.

      1. L’Occident encore l’Occident plus d’un demi-siècle après notre accession à la souveraineté, c’est pour le moins un aveu éloquent de notre impuissance. L’Occident première cause des malheurs des Congolais (Africains), c’est un peu court comme justification. Passons…
        Jusqu’à preuve du contraire ‘JK’ est notre PR depuis janvier 2001, censé être celui qui dirige le Congo…
        Jusqu’à preuve du contraire Katumbi et Tshisekedi sont des Congolais qui ici se positionnent en adversaires politiques du premier… Chacun d’eux a son rôle, son projet politique et ses responsabilités…
        Un patriote Congolais et tout observateur de dedans ou de dehors ont le loisir et surtout la responsabilité et l’intelligence de cibler qui ils juge coupable parmi nos leaders politiques attitrés dans nos errements criminels…
        Personnellement j’ai la faiblesse de dénoncer aussi et surtout le pouvoir en place dans sa mauvaise gestion généralisée de notre pays ! Libre à quelqu’un d’autre de jeter son regard ailleurs pourvu que nous arrivions à nommer nos maux et surtout à les réparer tant il devient de plus plus indéfendable que ce ce pays potentiellement riche continue à traîner une quasi totalité de citoyens les plus miséreux du monde à côté de quelques nantis sans honte se renouvelant impunément jour après jour…

        1. Belle replique a Dependahaert, plus kabiliste que l’Imposteur.

          Que ce mec commence d’abord par nous etaler le bilan de 16 ans de gestion catastrophique de son poulain, inbue des « 5 Sentiers de Fleaux ». Ensuite, qu’il conseille a son petit de respecter notre Constitution et de retourner a son vrai metier de chauffeur Dar-es-Salaam.

        2. Mon cher Nsumbu, vous n’êtes pas sans ignorer que Mobutu fut une « création » des Américains et des Belges. Que Kabila doit son accesion à la Présidence de la RDC par la volonté entre autre de La Belgique de Louis Michel. Que Katumbi et Tchilombo Felix sont en passe de suivre la même voie parce qu’il ne peut en être autrement. Dire que votre pays est souverain depuis 1960 et que l’Occident n’est pour rien dans ce que vit le Congo, c’ est tout simplement réfuser de regarder en face une vérité déplaisente.

          1. Compatriote Depandhaert,
            Je veux simplement dire que si le Congo et l’Afrique ne sont pleinement « souverains » depuis 1960, c’est largement de leur fait ! Conquérir leur « liberté », leur « indépendance » face aux puissances dominantes est une entreprise que seuls ils doivent accomplir, ce ne sont pas les étrangers dont vous dites bien qu’ils continuent à nous « coloniser » qui le feront à leurs places; eux poursuivent logiquement et même légitimement leurs ‘intérêts’ chez-nous, à nous de préserver les nôtres !
            La ‘déplaisante’ vérité c’est que la plupart de nos dirigeants « règnent », – facilité que quelque part tous ne leur accordons – ou pour les plus malins « gèrent » à la petite semaine mais ne « gouvernent » pas nos pays…

            « Gouverner » suppose « de tenir le gouvernail, la barre du navire, lui donner le cap, c’est assumer la responsabilité de la conduite de nos pays au risque d’échouer et même d’y perdre sa vie » ! Me direz-vous qu’un homme comme ‘JK’ « gouverne » le Congo en lui donnant le cap vers son réel développement plutôt qu’il ne travaille d’abord que pour son profit, son maintien au total dépend de ses citoyens ?
            Pour moi, le reste, vous l’aurez compris, n’est un vil plaidoyer pour des ‘hommes’ au pouvoir en place de celui indispensable pour la seule cause qui vaille : faire que les Congolais vivent mieux et approchent ainsi des standards de ces mêmes peuples que vous pourfendez ici dont leurs dirigeants ont fait mieux que les nôtres !

        3. PS
          Malheureusement au Congo comme généralement partout en Afrique, notre défense « souveraine » se résume souvent en ‘vociférations et incantations’ anti-Occident plutôt qu’en actes efficients conséquents, soit chez les prétendus ‘intellectuels’ en proclamant leur credo ‘anti-impérialiste’ tout azimut, soit chez les politiciens en croyant repousser les attaques extérieures sur leurs débordements criminels dans leurs propres pays (‘démentis’ gratuits façon Mende !)…
          Plus que de pourfendre orbi et urbi le ‘puissant Occident’, la responsabilité de nos pays nous revient pleinement : elle consiste à prendre conscience de nos forces et faiblesses et là-dessus notre première arme est de savoir ce que nous voulons et où nous devons conduire nos pays pour ainsi être « capables » d’imposer ou plutôt de négocier notre vision avec les puissants Occidentaux… C’est à nous de tracer le cadre dans lequel nos partenaires obligés doivent évoluer; et c’est possible !

          Ce monde de plus en plus globalisé nécessite davantage des coopérations et les gagnants ne seront pas toujours ceux qui disposent de la force brute (politique et économique), l’Afrique ‘faible’ qu’elle paraisse aujourd’hui a ses atouts : ses potentialités matérielles et humaines immenses qui en font un partenaire incontournable. La seule condition pour qu’elle, gagne aussi c’est de mettre d’abord tout son génie à construire sa « Maison » avec toutes ses richesses (la Chine l’a fait)…
          Cela nous est possible même face à des puissants Occidentaux qui recherchent leurs intérêts chez-nous pourvu que nous agissions, nous nous fixions des objectifs de performance et
          demandions des comptes à nos dirigeants afin qu’ils soient plus efficaces dans leurs fonctions de premiers gestionnaires du pays et des ‘cadres’ pour notre « développement intégral’ !
          Alors les étrangers quelles que soient leurs intentions nous craindront et nous respecteront parce qu’ils se seront trouvés devant nos réalisations propres, nos réelles ‘capacités d’hommes’ et non nos ‘éternels échecs de sous-hommes’…

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