Le château de cartes de Kagame

Au coeur de l’Afrique, un pays fort, petit, mais musclé, affiche une santé de fer. Se permet une démocratie illusoire, au risque de faire passer le grand Congo pour un jaloux. Regard sur un pays qui fait semblant de se développer.

Une participation de 96%, un plébiscite de 98% de voix. Joseph Staline, le grand dictateur, peut dormir tranquillement au Nécropole du mur du Kremlin à Moscou. Un autre homme poursuit donc son œuvre: Paul Kagame. Grand leader africain, à la fois charismatique et craint, le président rwandais incarne la nouvelle race des dinosaures politiques en Afrique.

Il faudra faire un tour chez Wikipedia pour en savoir plus sur l’histoire de ce président de 59 ans. Retenons ici que l’ancien allié de Laurent-Désiré Kabila et son Rwanda viennent de très loin. D’un triste et sanglant génocide dans les années 1994, le Rwanda se relève et battit un pays aujourd’hui exemple de bonne gouvernance et du miracle économique.

De 2000 à 2010, le PIB du Rwanda a plus que doublé. La croissance a été de 6,9% en 2014 avant de diminuer à 6,5% en 2015. Depuis vingt ans, indique la Banque mondiale (BM), le PIB rwandais par habitant a été multiplié par cinq. Parallèlement, ces dernières années, le taux de pauvreté a baissé d’environ 25 % et les inégalités ont été réduites.

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Cependant, derrière toute omelette, se cachent des œufs cassés et une poêle. Pour celle du Rwanda, l’œuf c’est la République démocratique du Congo, la poêle: un régime politique dirigé de main de fer depuis 23 ans par Paul Kagame, sans doute le président le mieux élu en Afrique.

Loin de deux guerres d’agression de la République démocratique du Congo, orchestrées et dirigées par le régime de Kagame, les ressources économiques du Rwanda sont toutes aussi issues du secteur minier, faisant du pays l’un des principaux producteurs de tantale, servant notamment à fabriquer des téléphones portables. Problème: ce minerai provient de la RDC, premier producteur mondial, que le Rwanda exporte illégalement. Outres les accusations, plusieurs rapports de l’ONU ont épinglé notre voisin dans la contrebande et le pillage de ressources naturelles de notre pays, ayant servi à sa réussite économique. Une grande partie de son coltan est extraite illégalement en RDC.

Les résultats économiques justement, ils sont en net recul. Le Rwanda a, certes, des atouts, mais aussi des points faibles. « Le mauvais état des infrastructures, le manque d’accès à l’électricité, enfin une capacité de production limitée constituent des obstacles majeurs à l’investissement privé« , note la Banque Mondiale dans un rapport relayé en 2015 par le journal Le Point. L’aide extérieure représente environ 40% de son budget de fonctionnement, indique la BM, qui souligne que les recettes intérieures du gouvernement, bien qu’en hausse, restent en deçà de la moyenne régionale.

« L’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts, mais de fortes institutions« , clamait l’ancien président américain Barack Obama dans son discours historique au Ghana en 2009. Si la thèse est approuvée par le monde entier, Paul Kagame et le Rwandais ont sans doute manqué cette allocution. Le président Rwandais se cache en effet derrière une machine à répression sans pareil en Afrique.

Côté démocratie, Paul Kagame n’a rien à envier à Staline, ni à Mouammar Kadhafi, faisant passer Joseph Kabila pour un apprenti. Le rôle de Kigali dans la déstabilisation de l’est de la RDC, d’une part, sa responsabilité dans l’assassinat de dissidents à l’étranger, d’autre part, lui ont en effet attiré les critiques de ses plus proches alliés, États-Unis en tête.

Interdit de se représenter pour un troisième mandat, Kagame a refusé « l’ingérence », initiant une modification de la révision de la Constitution par référendum en décembre 2015, pour finir par choisir lui-même aujourd’hui le 2% de rwandais qui n’auraient pas voté pour lui. Ses opposants dénoncent une réussite de façade dans le pays, une insécurité alimentaire et une pauvreté croissante. Selon eux, les chiffres sont manipulés par le gouvernement rwandais dans le but de continuer à percevoir des aides extérieures, avec la complicité des instances internationales…

Le président, qui n’a pas fait d’études universitaires, mais qui n’aura pas démérité, trône donc sur un château de cartes élégant de réussite en apparence, mais qui aura largement échoué à préparer sa succession et à consolider les institutions de son pays. Seul homme fort de son pays, Kagame s’appuie donc sur sa main ferme et des richesses loin de ses terres. Car, si le Rwanda tient une santé de fer, sur des millions de victimes du Nord-Kivu, ou même de Kisangani, rien n’est moins sûr que cette réussite économique subsiste à son guide suprême. Une image déjà vue un peu partout en Afrique.

LITSANI CHOUKRAN,
Le Fondé.

9 comments
  1. Que Dieu pardonne tous les kabilistes qui ont ouvert le chemin et établirent le tapis rouge au Rwanda pour s’enrichir.

    Oui, nous acceptons ce pillage occasionné par les kabilistes sportivement et sans défense comme un lapin en face du lion.
    Que Dieu Seul qui voit ce vole officialisé et encadré par les autorités congolaises soit Juge et pardonne ce crime.
    Car, Il voit comment les veuves, les orphelins et les ayants droits sont maltraités.

    Oh, que Nkungu wa Kumwanza, Mwenze Kongolo, Abdoulaye Ndombasi, Moïse Katumbi, Vitare Kamerhe et les autres de la MP , que se sang et les cris de misère tombent sur leurs fils et leurs progénitures jusqu’à la quatrième génération. !!!

    1. Mais tu te limites aux acteurs subalternes. Nulle part tu n’oses citer le chef de cette Haute Trahison d’AFDl, le pretendu « heros national » LDK lui-meme.

      Que dire alors de ses pretendus enfants et multiples epouses qui continuent a piller et appauvrir la RDC?

      Cette vaste famille d’intrus Rwando-Tanzaniens a pu depuis 1997 s’activer a renvoyer leur butin de vols de biens d’Etat soit a Kigali, a Dar-es-Salaam, a Tel Aviv et Iles Cayman (avec Dan Gertler), et a Pretoria avec Jacob Zuma et autres complices de cette vaste Mafia.

  2. En 1949, pour initier sa révolution culturelle, la Chine s’est posée 2 questions:
    1. Qu’est-ce qui entrave le développement de la Chine ?
    2. Quelle est la force de la Chine?

    En Août 1966, Mao Tse Toung lança le slogan  » LE GRAND BON EN AVANT  » avec la supression des QUATRE VIELLERIES OU QUATRE VIEILLES CHOSES :
    1. les vieilles idées;
    2. la vieille culture;
    3. les vieilles cooutumes;
    4. les vieilles habitudes.
    Comment ?
    – FERMETURE AUX FRONTIÈRES;
    – AUTONOMISATION (AGRICOLE, ÉCONOMIQUE ET SECURITAIRE).

    60 ans après, de 1949 à 2009, la Chine est devenue la 2ème puissance du monde.

    Que la RDC identifie ses vieilleries avec une FERMETURE AUX FRONTIÈRES avec ses voisins hostiles (Rwanda, Burundi, Tanzanie Ouganda et Sud Soudan), prédateurs et complices de millions de morts Congolais.
    La Rdc est délimitée comme suit avec ses pays:
    -Rwanda: 217 Kms;
    – Burundi: 233 Kms;.
    – Tanzanie: 635 Kms;
    – Ouganda: 765 Kms;
    – Sud Soudan: 459 Kms.
    Au total près de 2500 Kms moins les frontières maritimes (lac Kivu, lac Tanganyka…) cela représente 1300 Kms de frontières terrestres.
    De Gaulle disait  » pour faire le blocus de MONACO, il suffit de deux panneaux de sens interdit ».

    Au lieu de panneaux de sens interdit, la RDC croit à l’alternance politique pour changer de chauffeur, de pilote, de capitaine mais pas le véhicule, l’ avion, le bateau.

    Pour ne plus revivre dans l’insécurité, lançons le GRAND BON EN AVANT par référendum pour « ligoter » les futurs élus TOUJOURS COMPLICES.
    Préalable; à l’instar de la France pendant l’occupation Nazie de 1940-1944, création d’un comité national d’d’épuration.

  3. « Le Rwanda de Kagame, un pays qui fait semblant de se développer » selon vous parce que, si je vous ai compris, « il n’est pas certain que sa réussite subsiste au départ de l’homme fort actuel », parce que « sa santé de fer est assise sur des millions de victimes Congolaises, le pillage et la déstabilisation de notre pays », parce que son « régime est autoritaire »… Pourquoi pas, sauf que la réussite économique (et sociale) de Kagame est bien réelle malgré quelques chiffres trafiqués, elle est visible sur le terrain, sauf que contrairement à d’autres potentats africains, Kagame travaille réellement pour le développement de son pays et moins pour sa poche : cette belle fortune aura, qu’on le veuille ou non, engrangé un esprit de performance effectif sur le terrain sans parler de la pacification post-génocide dont l’inertie peut se poursuivre même après Kagame…
    Dans tous les cas, vaut mieux avoir à la tête du pays un « chef » qui apporte réellement un plus sur le terrain que la terre entière lui envie aujourd’hui que le genre d’imposteur criminel que nous avons chez-nous…
    Je comprends que Kagame coupable d’un « contre-génocide » plus sanglant dans notre pays n’inspire aucune sympathie d’un Congolais mais force est de constater que pour la majorité des Rwandais l’homme fort du pays fait son boulot quels que soient ses vols chez le voisin… Nos dirigeants feraient de même on s’en contenterait et surtout méfiez-vous, le Rwanda de Kagame ne fait pas semblant d’avancer, il a fait un grand pas en avant depuis deux décennies, il y’a vingt ans ce n’était qu’un ‘champ de ruines’ !
    C’est à le dépasser vu leurs énormes potentialités matérielles et humaines que les Congolais devaient s’atteler, pas à minimiser aveuglément ses réussites !

  4. Le Rwanda a muté de la dictature hutu vers une dictature tutsi plus coriace que la monarchie jadis decriée. Ajouter à cela cetre fausse croissance en laquelle nul de sérieux qui connait le Rwanda, les occidentaux excepté, l’avenir du Rwanda après Kagame se dessine clairement : le cycle du serpent se mordant la queue. Kagame a raté la phase de la reconcilation, exacerbant des haines souterraines plus dangereuses encore.

    1. Quand certaines gens se permettent de dire que le Rwanda pille les ressources minjeres de la RDC, un profane croirait que c’est un simple ramassage qui se fait comme du sable. Si c’etait le cas tous les congolais seraient riches et la RDC ne serait pas dans un etat desastreux. Le problème du Congo c’est la mauvaise gouvernance.

  5. Si le pillage des minerais de RDC Congo, par des rwandais, comme vous dîtes, servent à développer leur pays, dans ce cas, qu’est-ce qui aurait empêché les congolais de se piller eux-même pour développer leur pays ?
    Pourtant, dépuis leur indépendance, les congolais n’ont jamais arrêté de piller leur pays…Mais alors, se sont-ils développés ? Prendre le Rwanda comme bouc-émissaire, ce n’est pas cela qui changera leur situation ni ne cachera leur médiocrité.

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