Comprendre le scandale des passeports en RDC

L’agence de presse britannique Reuters a publié une enquête le jeudi dernier, qui déballe un montage douteux autour du marché des passeports biométriques en République démocratique du Congo. POLITICO.CD vous explique tout. 

C’est qui Reuters?

L’agence de presse Reuters fait partie des agences de presse qui couvrent l’information mondiales. Mais, contrairement à l’Agence Presse France par exemple, ou l’Agence congolaise de Presse (ACP), Reuters, qui a été fondée en 1851, se consacre majoritairement à l’information financière.

Près de 2 400 journalistes, rédacteurs, photographes et caméramans travaillent pour Reuters dans 196 pays à travers le monde.  L’entreprise est introduite en bourse de Londres en 1984 et y lève 52 millions de livres qui l’aideront à réaliser des acquisitions dans le secteur de la technologie, afin de poursuivre sa croissance, avant d’être achetée par le canadien Thomson Financial en 2007 pour fonder un nouvel ensemble rebaptisé Thomson Reuters. A ce titre, elle est donc très crédible quand elle publie une information.

C’est quoi son enquête?

Le journaliste d’investigations David Lewis, qui travaille également pour The Guardian, BBC, Yahoo, Washington Post, Salon, Fox News… bref des grands médias de ce monde, a enquêté pendant plusieurs mois sur le marché des passeports en République démocratique du Congo.

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Rappellez-vous, le gouvernement a décidé en 2015  de changer de passeport, disant mettre en place les « biométriques ». Voilà. M. Lewis a enquêté pour savoir qui bénéficiait vraiment de la vente de ces passeports, alors qu’un contrat a été signé entre plusieurs partenaires privés et notre gouvernement.

Et comme il fallait s’y attendre, David Lewis a découvert des choses pas nettes. Après avoir voyagé entre Kinshasa, Dubaï, en Emirat Arabe Unis, et dans plusieurs pays; le journaliste britannique qui est toutefois basé à Kinshasa à découvert que non seulement le gouvernement ne recevait que 65 USD sur les 185 du prix officiel, mais que des personnes proches du président Joseph Kabila étaient directement bénéficiaires de ce marché.

Qui sont impliqués?

Selon cette enquête, l’Etat congolais touche en effet 65 usd sur chaque passeport vendu, alors que la société belge qui fournit le matériel et le service, Simlex, touche quant à elle 48 dollars.  Une société basée à Dubaï et dénommée LRPS touche 60 USD et une autre basée à Kinshasa et dénommée  MANTENGA CONTACTO TRADING touche à son tour 12 USD.

Toutefois, tenez-vous bien, la société LRPS appartient en réalité à une certaine Makie Makolo Wangoi, que les enquêtes d’un autre média américain Bloomberg ont identifié comme Makolo wa Ngoy Kabila, que certains qualifient de « soeur » du président Joseph Kabila, alors que d’autres parlent de nièce. C’est donc elle qui touche 60 USD sur chaque passeport vendu en RDC.

Aussi, d’après la même enquête, Emmanuel Adrupiako, présenté ici comme « Conseiller » du président Kabila, aurait reçu plus de 700.000 $ pour avoir aidé à confier ce marché des passeports à la société belge Semlex.

En quoi est-ce un problème?

Comme vous pouvez vous en rendre compte, le pays ne touche même pas 50% du montant pour chaque passeport vendu. De plus, en comparant avec les autres pays, et surtout la situation financière de la population, il s’avère que ces passeports coûtent extrêmement cher. De plus, la même enquête révèle qu’en 2014, une société concurrente de celle qui a gagné ce marché a proposé l’unité à 28,5, contre 185$ actuellement, soit plus de 650% d’écart par rapport au prix actuel.

En outre, ce scandale s’ajoute à une longue lignée d’autres révélations impliquant des proches du président Joseph Kabila qui ont souvent utilisé leurs liens familiaux pour exploiter illégalement les ressources de l’Etat. En décembre 2016, l’agence Bloomberg a révélé que même les deux enfants du président Jospeh Kabila, qui ne sont même pas majeurs, possédaient des sociétés qui génèrent de millions de dollars chaque année.

Que va-t-il arriver maintenant

L’enquête a provoqué une véritable colère surtout au niveau de l’opposition congolaise. Le député congolais Claudel Lubaya a écrit une lettre au Procureur général de la République (PGR), Floribert Kabanga, pour lui demander d’ouvrir une enquête et de traduire les responsables en justice, pour qu’ils soient punis.

Pour l’instant, le Procureur n’a pas encore réagi. Mais, des experts disent qu’il est peu probable de voir le PGR nommé par le président Kabila lui-même ouverir une enquête à ce sujet. De son côté, le gouvernement admet la situation, sans toutefois parler de « scandale », démentant que des proches du président Joseph Kabila soient des principaux bénéficiaires de ce marché.

Néanmoins, au niveau de la Belgique, les Procureurs de Bruxelles, la capitale, ont annoncé ce jeudi avoir ouvert une enquête depuis le début de l’année 2017. Selon les explications de Madimba Kadima-Nzuji, Docteur en sciences juridiques de l’Université catholique de Louvain (Louvain-la-Neuve, Belgique) et rédacteur en Chef d’Economico.cd, les autorités belges ont tout à fait le droit se pencher sur ce dossier, d’autant plus que Semlex, qui est à la base de ce contrat controversé, est une société de droit belge.

« Semlex est une société de droit belge. Si le procureur ouvre un dossier, c’est qu’il y a suspicion de malversations dans le chef de cette société« , explique Docteur Kadima-Nzuji. Mais il a jouté:  : « l’ouverture d’un dossier ne signifie pas qu’il y aura automatiquement procès, l’affaire peut être classé sans suite. »

Que risque les concernés?

La société belge ou même l’Etat congolais risquent gros en cas d’une condamnation dans cette affaire où les autorités belges semblent avoir plus que de soupçons. « Si une infraction est avérée, toutes les parties prenantes à ce contrat peuvent être condamnées : leurs comptes peuvent être saisis à titre conservatoire, des dirigeants peuvent être condamnés avec sursis ou à de la prison ferme, des amendes peuvent être prononcées contre la société » ajoute le rédacteur en Chef du site congolais spécialisé dans l’actualité économique.

Et si jamais par miracle le PGR Floribert Kabange décidait d’agir, il pourrait tout aussi se baser sur les dossiers de ces collègues belges pour des poursuites en RDC.  « Ce qui est intéressant à souligner est que le procureur congolais peut sur base d’une condamnation enquêter et poursuivre les personnes impliquées dans cette affaire et qui réside sur le territoire« , commente Docteur Kadima-Nzuji.

 

11 comments
  1. J’aime bien le Rais, Mais ça c’est une honte, je me suis toujours demandé pourquoi le passeport congolais est si cher, un document dont le seul objectif est de faciliter le citoyen a se déplacer hors de son pays. ses allégations sont crédibles d’autant plus que les autorités ne laisseront jamais des firmes étrangères faire profit sur le dos des citoyens et qu’elles restent les yeux fermés, donc elles en savent quelque chose

  2. kanambe alias kabila a prix le pays en otage avec sa bande de MP est sa famille biologique le voleur dela RDC avec un mafia organise , il ne sont pas honte cette ruandais de kabila il criminels il la tue bcp de congolais est il sera traduit en justice avec sa bande

    1. Tolingi moyibi te kasi tobelela mpe tolobela oyo ya miyibi nyonso!!! Faites la lumiere sur les cadavres dans TOUS les placards pas seulement ceux de la Kabilie si c’est vraiment pour l’interet de la population congolaise et si c’est vraiment pour ne servir que la VERITE et la JUSTICE!!! Autrement, vous ne faites qu’accrediter la theorie selon laquelle, les anti-Kabilie achetent ce genre d’articles/ d’enquetes pour nuire a JK et l’affaiblir. Mais si vraiment ils aimaient le pays, ils devraient denoncer ces choses et renoncer a ce que eux-memes faisaient comme maffia, pendant qu’ils etaient aux affaires et s’en repentir PUBLIQUEMENT! C’est ici le lieu d’evoquer encore une fois l’histoire de la paille et de la poutre! Nous nous refusons de nous laisser berner/ emouvoir par ces revelations. Miyibi baza ebele tant en Kabilie qu’au RassOp et meme a la Monusco (d’ailleurs il y a des complicites entre eux!!!).

  3. Ce qui est étonnant, le pouvoir en place ne dit rien. Lorsqu’il y a vole, détournement de denier publique les kabilistes, on constate leurs encouragement, des promotions, etc. mais si ce le minable congolais, c’est la prison. Alors vous pouvez aujourdhui faire semblent mais n’oubliait pas demain la justice va vous rattrapée.
    L’impunité a dépasser les limités et sans honte, ils prétend, nous amener aux élections.
    Des voleurs, vous allez tous rendre ce qui nous appartient.

  4. C´est vraiment une honte, celui de l´Angola (un pays avec une longue histoire de trouble politique) ne coute 4.000,00 Akz, + 900 Kz du certificat de residence, soit 25$ au taux de la Banque nationale ou 12$ au taux parrallele.
    Et ça ne comporte pas une puce, mais il est bonne qualité et accepté sur toute l´espace chengen.

  5. Ceci montre exactement que notre gouvernement ne l’est que pour les soit-disants dirigeants. Il ne fallait pas être expert pour savoir que quelque chose pas bonne était derrière le prix exhorbitant du passeport. Je me rappelle en 2009 avoir écrit au Président de la République pour lui demander d’user de ses compétences pour faciliter accès de passeports aux citoyens congolais en leur offrant ce document à une valeur ne dépassant pas 30$ et facturés en Francs congolais. Comme vous pouvez l’imaginer – pas de réponse.

    Cependant, la maffia s’étend même plus loin. Par exemple en Afrique du Sud où je réside, les autorités accréditées à l’ambassade ne sont que de simples trafiquants de documents. Une simple lettre est vendue à 30$ ou encore 500Rands. Le passeport lui est vendu à 5000Rands, soit 400$. En plus, il est vendi à n’importe qui ayant ses moyens d’acquisition sans regard sur la nationalité. Les grands acquéreurs sont les Nigérians et Camerounais. Et imaginez-vous pourquoi ces nationalités aimeraient avoir ces passeports!

    Peut-être l’enquête devait/doit également s’étendre aux représentations diplomatiques congolaises.

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