Joseph Kabila: juge et partie?

En prenant acte de l’Ă©chec de la mĂ©diation des Ă©vĂŞques de la CENCO, le prĂ©sident Jospeh Kabila a promis de « continuer Ă  oeuvrer pour la mise en oeuvre de l’accord ». Une promesse qui fait peut-ĂŞtre du PrĂ©sident juge et partie dans une crise dont il est pourtant protagoniste.

Trois mois après le dĂ©but des discussions autour de l’arrangement particulier, les Ă©vĂŞques de la ConfĂ©rence Ă©piscopale nationale du Congo (CENCO) ont jetĂ© l’Ă©ponge, devant le blocage constaté dans ces pourparlers oĂą la MajoritĂ© PrĂ©sidentielle et le Rassemblement n’ont pu accorder leurs violons pour appliquer l’accord obtenu le 31 dĂ©cembre dernier.

Pour officialiser la fin de cette mĂ©diation entamĂ©e sur demande du prĂ©sident Joseph Kabila en novembre dernier, les Catholiques ont rencontrĂ© dans la foulĂ©e le Chef de l’Etat, qui a nĂ©anmoins signifier que ce camouflet ne devrait pas mettre en pĂ©ril l’accord.  « Son Excellence, Monsieur le PrĂ©sident de la RĂ©publique a notĂ© que la CENCO ne s’est pas ContentĂ©e de Constater les divergences ; elle a, en mĂŞme temps, prĂ©sentĂ© des Suggestions Ă  partir desquelles le Chef de l’Etat s’implique dès Ă  prĂ©sent« , a expliquĂ© un communiquĂ© lu Ă  la tĂ©lĂ©vision nationale dans la foulĂ©e de cette rencontre.

« Pour Son Excellence, Monsieur le PrĂ©sident de la RĂ©publique, l’impasse actuelle ne doit aucunement signifier une rupture dĂ©finitive du dialogue. Au Contraire, les Ă©changes doivent se poursuivre afin de dĂ©boucher, dans le plus bref dĂ©lai, Sur les Voies les plus adĂ©quates pour la mise en Ĺ“uvre effective de l’accord dit de la Saint Sylvestre« , insiste ce communiquĂ©.

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« Nemo judex in causa sua »

Comme Ă  l’issue du Dialogue de la CitĂ© de l’Union Africaine, le prĂ©sident Joseph Kabila se pose ici, une fois de plus, en juge de cette crise crĂ©Ă©e pourtant Ă  cause de son non-dĂ©part de la tĂŞte du pays, consĂ©cutive Ă  l’absence d’Ă©lection prĂ©sidentielle telle que prĂ©vue Ă  l’issue de l’annĂ©e 2016. Une position qui n’arrange pas l’opposition, qui dĂ©nonce dĂ©jĂ  le PrĂ©sident congolais.

« Nous avons appris que le chef de l’Etat a finalement récupéré sa position. Nous avons toujours dit qu’en tant que garant de la Nation, il est le problème et la solution en même temps », a estimé Eve Bazaiba, secrétaire Général du Mouvement de Libération du Congo et Chef de file du Front pour le Respect de la Constitution (FRC).

« La crise actuelle n’est pas due au fait qu’il y a un problème de mise en place du Gouvernement, mais au fait que nous sommes à la fin du mandat du Président Kabila depuis le 19 décembre 2016, la non tenue des élections, principalement la présidentielle dans le délai constitutionnel« , a martelé Mme Bazaiba dans une interview accordée vendredi à Radio Okapi.

MĂŞme son de cloche du cĂ´tĂ© du Rassemblement, oĂą Christophe Lutundula, vice-prĂ©sident du G7 est allĂ© jusqu’Ă  usĂ© d’une question mĂ©taphore originale pour dĂ©noncer la situation. « Comment le coach d’une Ă©quipe peut-il proposer d’encadrer l’Ă©quipe adverse dans un match qui oppose les deux clubs« , a-t-il lancĂ© Ă  la presse.

En droit, quand on est juge, on doit gĂ©nĂ©ralement dĂ©cider si celui qui est accusĂ© d’avoir commis une faute, au dĂ©triment de quelqu’un d’autre, l’a rĂ©ellement fait et, si oui, prononcer la peine qu’il mĂ©rite. C’est dans une telle situation que nous avons affaire Ă  deux ‘parties’, la partie plaignante, celle qui s’est plainte de l’entourloupe que la partie adverse lui a jouĂ©e, et cette dernière.

« Aliquis non debet esse judex in propria causa, quia non potest esse judex et pars », est la formule juridique latine Ă  l’origine de: personne ne doit ĂŞtre juge de sa propre cause, parce qu’on ne peut ĂŞtre juge et partie. Une expression qu’on trouve aussi sous la forme rĂ©duite « nemo judex in causa sua » (nul ne peut ĂŞtre Ă  la fois juge et partie), est pleine de sagesse : en effet, il ne saurait ĂŞtre question de dĂ©signer un fautif probable comme juge de la faute. Quelqu’un peut-il avoir suffisamment d’impartialitĂ© pour ĂŞtre Ă  la fois juge et partie, pour juger Ă©quitablement ses propres fautes ? Ă€ part celui capable de tendre la joue gauche quand on lui a frappĂ© la droite (si vous en connaissez un, non masochiste, prĂ©sentez-moi cet oiseau rare !), quel individu, en cas de faute grave n’aura pas tendance Ă  s’auto-amnistier au lieu de s’auto-condamner ?

« On peut indubitablement constater qu’Ă  la fin d’un procès, lorsque le tribunal est vide, les magistrats sont bien Ă  la fois juges et partis », a toutefois rĂ©agi un cadre de la MajoritĂ© PrĂ©sidentielle, joint pour rĂ©pondre Ă  ces faits. Le dĂ©bat est lancĂ©.

Litsani Choukran,
Le Fondé.

2 comments
  1. « À la fin de l’audience, lorsque la salle est vide » les magistrats ne sont pas juges et parties .La dĂ©cision est rendue au nom du peuple

  2. Ce sont-la les hĂ©rĂ©sies de la MP. Avec ces membres qui ont bu dans la coupe de leur autoritĂ© dite morale…et qui de la peine a lacher car ils ne savent pas trop bien quel sera leur sort eux qui n’ont rien fait pour le peuple qui leur a confie son pouvoir…Ils finiront quelque part quelque temps…

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